Avril 2000
Lettre de Padre Pio à Donna Raffaelina Cerase
O Raffaelina, quelle consolation de savoir qu'un esprit céleste nous garde toujours et qu'il ne nous abandonne pas même - chose admirable - lorsque nous offensons Dieu !
Sachez, Raffaelina, que ce bon ange prie pour vous. Il offre à Dieu tout ce que vous faites de bien, vos désirs saints et purs. Aux heures où vous croyez être seule et abandonnée, ne vous plaignez pas de ne pas avoir une âme amie à qui vous puissiez vous ouvrir et confier toutes vos souffrances. De grâce ! n'oubliez pas ce compagnon invisible toujours là pour vous écouter, toujours prêt à vous consoler !
O, douce intimité, ô bienheureuse compagnie ! Oh, si tous les hommes savaient comprendre et apprécier ce si grand don que Dieu, dans l'excès de son amour pour l'homme, nous fit en cet esprit céleste ! Souvenez-vous souvent de sa présence ! Il faut le regarder avec les yeux de l'âme ; remerciez-le, priez-le ! Il est si délicat, si sensible ! Respectez-le ! Ayez toujours la crainte d'offenser la pureté de son regard.
Invoquez souvent cet ange gardien, cet ange bienfaisant. Répétez souvent la belle prière : "Ange de Dieu qui êtes mon gardien par un bienfait de la divine providence, éclairez-moi, protégez-moi et dirigez-moi, à présent et toujours !" Quelle sera la consolation, ô ma chère Raffaelina, quand à l'heure de la mort votre âme verra cet ange si bon qui vous accompagna tout au long de votre existence et qui eut pour vous une telle sollicitude maternelle !
Extrait de "La voix du Padre Pio", Lettre à Donna Raffaelina Cerase.
L'ange de l'abandon à la vie
S'abandonner, se laisser aller : l'expression évoque d'abord une grande passivité , un renoncement résigné.
Celui qui ne parvient pas à donner activement forme à sa vie, à la prendre en main, s'abandonne tout simplement à sa destinée ; il renonce à lui-même. Or ce n'est assurément pas à une telle attitude que veut nous inciter l'ange de cet abandon-là ; il a autre chose en vue. Ici, s'abandonner signifie d'abord s'engager. Qui s'en remet à la vie se plonge dans la vie et dans son mouvement. Il ne se tient pas en retrait. Il ne se cramponne pas convulsivement à lui-même, mais s'abandonne au flux de la vie. Ainsi, quelque chose en lui peut s'épanouir et devenir vivant.
S'abandonner, c'est le contraire de se retenir. Bien des gens se cramponnent à l'image d'eux-mêmes ; d'autres à leurs habitudes, ou a leurs possessions, à leur réputation, à leur succès. L'ange de l'abandon à la vie veut nous initier à l'art de de nous déprendre de nous-mêmes, de nous en remettre à la vie, et finalement à Dieu. Je ne peux y parvenir que si j'ai l'assurance de ne pas me livrer à l'arbitraire, mais à un ange qui me veut du bien.
Qui s'en remet à son ange est libéré des soucis superflus par lesquels tant de gens aujourd'hui se laissent martyriser. Il cesse d'être obsédé par lui-même et par sa santé, par ses succès, par le souci d'être reconnu.
Dans cette attitude d'abandon il n'y a pas seulement de la confiance, mais aussi une grande liberté intérieure. Si je ne me sens pas obligé de tout faire par moi-même, si je m'en remets tout simplement à Dieu, assuré qu'Il prendra soin de moi, alors je suis libéré de toute relation crispée au moi.
L'ange de l'abandon à la vie veut aussi nous enseigner la confiance qui nous permet de nous en remettre à un autre être. Si tant d'amitiés et de mariages échouent aujourd'hui, c'est parce que chacun reste accroché à lui-même, par peur de s'abandonner. C'est la peur de perdre sa liberté, la peur que l'autre ne puisse faire de nous ce qu'il veut, que nous soyons livrés à son arbitraire, et finalement à sa méchanceté. Or sans cet abandon de soi-même, aucune relation ne peut réussir. En effet, chacun veillerait alors seulement dans la crainte, à garder le contrôle de lui-même, de ses émotions, de ses paroles et de ses actes, et à ne surtout pas se remettre entre les mains d'autrui. Mais s'il en est ainsi, aucune confiance ne peut se développer ; l'autre ne peut même pas manifester qu'il a de bonnes intentions, qu'il n'abusera pas de la confiance qui lui est accordée. S'en remettre à l'autre, cela ne signifie pas renoncer à soi-même. Je ne peux le faire que si j'ai un bon contact avec moi-même, si je sais qui je suis. Dans cet abandon, il y a cependant toujours un risque. Je fais le saut hors de la sécurité dont je bénéficie en restant refermé sur moi-même, et je me remets entre les mains de l'autre. Cela ne peut réussir que si je sais que cet autre n'est pas un diable, mais un ange qui me recueille et me porte dans ses mains, qui me veut du bien.
Je connais bien des gens qui pensent devoir tout faire par eux-mêmes, travailler durement sur eux-mêmes pour avancer dans la vie et réaliser leurs visées idéales. Ils se donnent beaucoup de mal pour faire le bien. Mais vient un moment quelconque où ils sentent qu'ils ne pourront pas atteindre tous les buts qu'ils se sont fixés. Ils peuvent bien prendre autant de résolutions qu'ils voudront, jamais ils ne les réaliseront toutes. Sans cesse ils sont confrontés à l'insuffisance de leur propre réalité. Il s'agit alors de lâcher prise, et de s'en remettre à l'ange que Dieu nous a envoyé afin que notre vie soit réussie. C'est là une attitude non pas de résignation pure et simple, de renoncement, mais de liberté. Je sens qu'après tout, c'est vrai, je ne suis nullement obligé d'atteindre tous les buts que je voudrais, qui ne sont que l'expression de ma propre ambition et non pas, tant s'en faut celle de la volonté divine. Si, méditant je me place devant Dieu et tends vers Lui mes mains vides, alors j' éprouve cette liberté qui procède de l'attitude d'abandon, je me laisse choir en Dieu, je sais qu'Il me tient, qu'il m'est permis d'être, dans la bonté de Ses mains, simplement tel que je suis. Le coeur même de la foi du chrétien, c'est cela : l'expérience de la liberté en vue de laquelle le Christ nous a libérés (cf. Galates, 5, 1).
Extrait de : Anselm Grün, Petit traité de spiritualité au quotidien, © Albin Michel.
Anselm Grün O.S.B. est un moine bénédictin de l'abbaye de Münsterschwarzach en Allemagne.
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