Exposition
sur l'histoire et l'actualité de
la dévotion au Sacré-Coeur de Jésus



Panorama des thèmes présentés dans cette exposition

Jusqu’au XVIIe siècle - XVIIIe siècle - XIXe siècle - XXe siècle - Thèmes généraux


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1914/1918 - Le Sacré-Cœur durant la Grande Guerre

Chronologie - Photographies - Cartes postales - Illustrateurs - Journaux
Œuvre des insignes - Insignes et drapeau - Artisanat de tranchée - A l'école
Prières et Consécrations - Loublande - Porte-timbres - Vignettes Delandre


1914

1er août : mobilisation générale en Allemagne et en France.
3 août : l'Allemagne déclare la guerre à la France.

Ne sont mentionnés ci-dessous que les événements et dates en lien avec la dévotion au Sacré-Cœur.
La chronologie détaillée de la Grande Guerre peut être aisément consultée sur internet, par exemple :
Herodote.net - Historial de la Grande Guerre - Histoire pour tous

Livre de référence : Alain Denizot, Le Sacré Cœur et la Grande Guerre, Nouvelles Editions Latines, 1994.




Le 8 septembre, par l'Exhortation apostolique Ubi primum, Benoît XV lance un appel à la paix entre les belligérants.

« Lettre de S. S. Benoît XV en faveur de la paix
Aussitôt appelé à la Chaire du bienheureux Pierre, tout en sachant combien Nous sommes inférieur à une si haute charge, Nous Nous sommes soumis avec le plus grand respect aux secrets conseils de la Providence divine, qui a élevé Notre humble personne à une telle hauteur de dignité. Nous n’ignorions certes pas que Nous ne possédions pas les mérites qu’exigeait pareille charge ; Nous l’avons néanmoins acceptée, Nous confiant dans la bonté divine et ne doutant pas que Celui-là même qui Nous a imposé le poids très lourd de cette dignité Nous donnera la force et l’aide opportunes.
Mais aussitôt que, du haut de ce Siège apostolique, Nous eûmes jeté nos regards sur le troupeau confié à Nos soins, Nous avons été frappé d’horreur et d’angoisse inexprimable par le spectacle monstrueux de cette guerre, dans laquelle une si grande partie de l’Europe, ravagée par le fer et le feu, ruisselle de sang chrétien.
Nous avons reçu de Jésus-Christ, Bon Pasteur, dont Nous tenons la place dans le gouvernement de l’Eglise, le devoir rigoureux d’embrasser avec les entrailles d'un amour paternel tous ceux qui sont des agneaux et des brebis de son troupeau.
Puisque donc, à l’exemple du Seigneur Lui-même, Nous devons être prêt, ainsi que Nous le sommes, à donner même Notre vie pour leur salut à tous, Nous avons fermement établi et délibéré de ne rien négliger de ce qui sera en Notre pouvoir pour hâter la fin d’une si grande calamité.
En attendant et même avant que, selon la coutume des Pontifes romains au début de leur apostolat, Nous adressions des Lettres encycliques à tous les évêques, Nous Nous sommes senti pressé de reprendre les paroles que le premier grondement de cette guerre suggéra à Notre prédécesseur Pie X, de très sainte et immortelle mémoire, son amour et sa sollicitude pour le genre humain.
Partant, tandis que Nous-même lèverons, suppliants, vers Dieu, les yeux et les mains dans la prière, Nous invitons et conjurons, ainsi que Notre prédécesseur, tous les fils de l'Eglise, et spécialement les ecclésiastiques, de continuer de s'employer sans relâche, soit à titre privé, par d'humbles prières, soit en public, par des supplications solennelles, à demander à Dieu, maître et arbitre de toutes choses, que, se souvenant de sa miséricorde, il dépose le fléau de sa colère, par lequel il demande aux nations raison de leurs fautes.
Qu'elle nous assiste et qu'elle soutienne, de sa prière le vœu universel, la Vierge Mère de Dieu, dont la bienheureuse naissance, célébrée en ce même jour, a brillé aux yeux du genre humain fatigué comme une aurore de paix, car elle devait engendrer Celui dans lequel le Père éternel a voulu réconcilier toutes les choses en pacifiant, par le sang de sa croix, tout ce qui se trouve au ciel et sur la terre.
Nous prions et conjurons ardemment ceux qui dirigent les destinées des peuple d'incliner désormais leurs cœurs à l'oubli de leurs différends en vue du salut de la société humaine. Qu'ils considèrent que assez de misères et de deuils accablent cette vie mortelle et qu'il n'y a vraiment pas sujet de la rendre encore plus misérable et triste ; qu'ils se persuadent qu'il suffit de considérer ce qui a été fait de ruines et ce qu'on a répandu de sang humain ; qu'ils se résolvent donc à entrer dans des voies de paix et à se tendre la main. Ils mériteront par là les bénédictions de Dieu et celles de leurs nations et ils auront hautement mérité de la société civile. Qu'ils sachent enfin qu'ils feront par là une œuvre qui Nous sera très agréable et que Notre cœur désire ardemment à cette aube de Notre ministère apostolique, dont une si grave perturbation des choses aggrave tellement les difficultés.
Du palais du Vatican, ce 8 septembre, jour de la Nativité de Marie très sainte.
BENOIT XV, Pape.
»
Traduction française du Journal La Croix n°9665, 16 septembre 1914. - Texte intégral original italien.




La Croix n°9665, 16 septembre 1914



La Croix n°9665, Appel de Benoît XV


Dès les premiers jours, on voit apparaître tant au front qu'à l'arrière, des images, insignes, et scapulaires, que les combattants mettent à leurs capotes, à leurs képis ou sur leurs bérets.

Répondant à l'appel de l'archevêque de Lyon, le Cardinal Hector Irénée Sevin (1852-1916), la Ligue des Femmes Françaises lance dès l'automne un programme de soutien matériel et spirituel destiné aux soldats du front et aux réfugiés, femmes et enfants, en provenance des provinces du Nord envahi par les armées allemandes. Les ligueuses joignent l'action à la prière, et confectionnent des « Petits Paquets » de vêtements et nourriture, distribués à tous les nécessiteux. Elles distribuent aussi largement le scapulaire du Sacré-Cœur aux soldats en partance pour le front :

« A ces hommes qui marchent au-devant des plus durs sacrifices, nous remettons l'emblème qui relève les courages, qui sanctifie la souffrance, qui appelle sur eux et sur la France la protection divine. [...] La ligueuse qui dirige notre permanence de la gare à la sainte ambition de munir tous les militaires qui traversent Perrache de ce pieux insigne. Elle a mis à contribution les couvents, les ouvrières et les ouvroirs. On a confectionné et distribué plus de 30.000 scapulaires. Ceux-ci sont presque toujours reçus avec empressement. Quelques soldats en réclament pour leurs camarades oubliés dans la distribution. Et bien souvent nos scapulaires sont arborés sur le képi ou sur la poitrine. « Donnez, Madame, nous disait un sergent en montrant sa décoration, c'est auprès de ma médaille que je veux l'épingler. » Puisse le Divin Cœur, placé sur la poitrine de nos soldats, les garder et les protéger. »
Assemblée Générale de la Ligue des Femmes Françaises (Section de Lyon), 14 Février 1915. Compte rendu présenté à Son Eminence le Cardinal-Archevêque de Lyon par Mme A. Vignon, présidente, in 1914-1918. Ligue des Femmes Françaises pendant la Guerre (Comité diocésain de Lyon), Lyon, Imprimerie du Nouvelliste, 1919, pp.8-9.


Voir également la page des sauvegardes


La mobilisation a interropmpu la parution des différents titres de la Maison de la Bonne Presse, dont l'hebdomadaire Le Pèlerin, la majorité du personnel étant partie sous les drapeaux (Cf. Le Pèlerin dans la guerre). Ce journal ne reparaît qu'à la Toussaint, le 1er novembre, et un article intitulé Le réveil de la foi chez nos soldats assure la distribution en trois mois de pas moins « de trois millions de ces insignes [carré d'étoffe blanche portant, imprimé en rouge, l'emblème du Cœur de Jésus] », et que « les médailles ont été enlevées en plus grands nombre encore peut-être. »



Le Pèlerin n° 1962, 1er novembre 1914



Le Pèlerin n° 1962, article



Le Pèlerin n° 1962, détail



Le Pèlerin n° 1962, article (suite)


Les articles du journal Le Pèlerin relatifs au Sacré-Cœur durant la Grande Guerre sont rassemblés sur cette page




Par ce Signe tu vaincras



In Hoc Signo Vinces



Edition du Propagateur des Trois Ave Maria



Le 27 décembre, les évêques allemands adressent à tous les catholiques une lettre pastorale, les invitant à se consacrer au Sacré Cœur de Jésus. Face au châtiment de la guerre, ils appellent les fidèles à se repentir « en particulier pour nos propres péchés, pour notre négligence au service de Dieu, pour notre faiblesse et notre lâcheté, pour notre tiédeur et notre demi-mesure ; puis pour la culpabilité du peuple tout entier, pour tant de blasphèmes et de déni de la vérité éternelle, pour une transgression si honteuse des commandements éternels de Dieu, pour tant de mépris de la grâce, pour tant d'ingratitude envers l'amour rédempteur infini du Sauveur, pour tant de dommage au royaume de Dieu... »

« En ce début d'année 1915, nous voulons consacrer une fois de plus nos cœurs, nos familles, nos communautés et nos diocèses au Sacré-Cœur de Jésus. Le sérieux et la nécessité des temps nous y obligent. Un acte de réparation pour de si nombreux et graves péchés dans la vie du peuple, le mariage, la famille, précèdera la consécration. Celle-ci sera accomplie le 10 janvier 1915, jour de l'Epiphanie, dans toutes les églises catholiques, selon la formule de Léon XIII consacrant le monde entier au Cœur de Jésus le 11 juin 1899. »
La journée de consécration du 10 janvier 1915 est précédée d'un Triduum de prières, du 7 au 9 janvier, dans tout le pays.
Le 100e anniversaire de cette consécration sera célébré en l'Allemagne le 11 janvier 2015 par un dimanche dédié au Cœur de Jésus.



Die Weihe Deutschlands an das Herz Jesu
Predigten für das vorausgehende Triduum 7. bis 9. Januar 1915

La consécration de l'Allemagne au Cœur de Jésus
Sermons pour le Triduum précédent du 7 au 9 janvier 1915


1915

Benoît XV rédige une prière pour la Paix, qui est largement diffusée en France par les journaux catholiques, les bulletins paroissiaux, sur les images pieuses...

« Attristés par les horreurs d’une guerre qui entraîne dans son tourbillon les nations et les peuples, nous nous réfugions, ô Jésus, dans Votre Cœur très aimant comme dans un suprême asile ; de Vous, Dieu des Miséricordes, nos gémissements implorent la cessation de l’épouvantable fléau ; de Vous, Roi pacifique, nos vœux sollicitent le retour si désiré de la paix.
De Votre Cœur divin, Vous fîtes rayonner dans le monde la charité, afin que, toute discorde cessant, l’amour seul régnât entre les hommes ; durant Votre vie mortelle, ici-bas, Votre Cœur palpita d’une très tendre compassion pour les disgrâces humaines. Oh ! que ce Cœur s’émeuve donc encore en cette heure-ci, chargée, pour nous, de haines si funestes et de si horribles carnages !
Prenez pitié de tant de mères, angoissées pour le sort de leurs fils ; pitié de tant de familles, orphelines de leur chef ; pitié enfin de la malheureuse Europe que menace une si vaste ruine !
Inspirez Vous-même aux gouvernants et aux peuples des conseils de douceur, résolvez les conflits qui déchirent les nations, faites que les hommes se donnent de nouveau le baiser de paix, Vous qui, au prix de Votre Sang les avez rendus frères. Et comme, un jour, au cri suppliant de l’apôtre Pierre : Sauvez-nous, ô Seigneur, nous périssons, Vous répondîtes avec pitié, en calmant la tempête de la mer : de même aujourd’hui, à nos confiantes prières, répondez par le pardon, en rétablissant dans le monde bouleversé la tranquillité et la paix.
Vous aussi, ô Vierge Très Sainte, comme Vous le fîtes en d'autres temps de terribles épreuves, aidez-nous, protégez-nous, sauvez-nous. Ainsi soit-il. »



C. Paillier, éditeur, Lyon
(verso)



Edition carmélitaine
(verso)



C. Paillier, éditeur, Lyon
(verso)




Imprimatur Luçon (Vendée), 1915
(pages intérieures - verso)


Le 11 juin, l'Episcopat français consacre à son tour la France au Sacré-Cœur. A cette occasion est lue dans toutes les églises de France une formule portant pour titre Amende honorable et consécration de la France au Sacré-Cœur de Jésus.




Texte de la Consécration
Bouasse-Lebel & Fils & Massin, Paris



Texte de la Consécration
(pages centrales)



Texte de la Consécration
(verso)


Voir également la page Prières et consécrations


L'Œuvre des Insignes du Sacré-Cœur (19 quai de Tilsitt à Lyon) se charge désormais de faire distribuer pour la population et les soldats du front insignes et drapeaux.

Au printemps 1915, le P. Mateo est venu à Lyon prêcher l'Intronisation du Sacré-Cœur dans les familles. L'archevêque de Lyon en a confié la propagande à la Ligue des Femmes Françaises pour son diocèse, avec le P. Perroy à sa direction. Les ligueuses sont bientôt appelées « les apôtres du Sacré-Cœur », et cet apostolat se manifeste aussi par l'adhésion à l'archiconfrérie de prière et de pénitence de Montmartre et la distribution de l'insigne du Sacré-Cœur « Espoir et salut de la France », diffusé par l'Œuvre du Sacré-Cœur du quai Tilsitt. L'insigne est désormais joint aux « Petits Paquets » envoyés au soldats.

« Il semble que l'heure présente soit propice aux grands actes de foi auxquels Dieu répondra, n'en doutons pas, par de grandes miséricordes. Il n'a pas suffi à la piété française d'adorer le Sacré-Cœur dans ses temples et de lui adresser un trône au sanctuaire familial. Elle a voulu lui donner droit de cité et lui conquérir la voie publique. Qui aurait osé espérer, il y a quelques années, que nous verrions dans nos rues, des milliers d'hommes, de femmes, de jeunes filles portant sans respect humain, bien plus avec fierté l'insigne du Sacré-Cœur « Espoir et salut de la France ». C'est cependant le spectacle qu'il nous a été donné de contempler. Ce moivement lancé à Lyon il y a un an par le Comité des Petites Relations d'Orient (1), avec quel succès vous le savez, a eu aussitôt toutes nos sympathies.
Nous l'avons secondé de notre mieux en demandant qu'une vente des insignes soit faite dans tous nos comités du Rhône, leur laissant le choix entre la broche et le drapeau. Cette proposition a été fort bien accueillie quand elle n'a pas été devancée. Qu'il nous soit parmis ici de remercier le Comité du quai Tilsitt qui nous a si généreusement fourni des insignes pour l'expédition de nos petits paquets. De nombreuses lettres venues du front nous ont apporté l'expression de l'empressement avec lequel nos braves soldats accueillent et réclament l'insigne du salut.
»
(1) : Syrie, Egypte, Arménie. Le Comité de l'Œuvre est implanté également au 19 quai Tilsitt.
Rapport présenté à Son Eminence le Cardinal Sevin à l'Assemblée Générale du 26 Mars 1916 par Mme A. Vignon, présidente, in "1914-1918. Ligue des Femmes Françaises pendant la Guerre" (Comité diocésain de Lyon), Lyon, Imprimerie du Nouvelliste, 1919, pp.22-23.
Pour la totalité du conflit, ces distributions représenteront douze millions d'insignes, plus d'un million cinq cent mille fanions, trois cent soixante quinze mille scapulaires et plus de trente deux mille drapeaux.



Insignes Lyonnais - A. Augis
19 quai de Tilsitt, Lyon



Insignes Lyonnais - A. Augis
19 quai de Tilsitt, Lyon



Insignes Lyonnais - A. Augis
19 quai de Tilsitt, Lyon


Voir également la page Insignes et drapeau


Début juillet, le ministre de l’Intérieur envoie un télégramme à tous les préfets de France, leur demandant de prendre un arrêté visant à interdire l’apposition d’emblèmes sur le drapeau national, au nom du maintien de l’ordre public :

« Considérant qu'il est essentiel de maintenir au drapeau de la France son caractère national ;
que l'apposition sur ce drapeau ou sur un insigne aux couleurs nationales d'un emblème quelconque porte atteinte à ce caractère ;
ORDONNONS CE QUI SUIT [Arrête] :
ARTICLE PREMIER - Est seule autorisée, soit sur la voie publique soit dans les édifices ouverts au public, l'exhibition de drapeaux aux couleurs nationales, sans l'addition d'aucun emblème, et de drapeaux des nations alliées ou des nations neutres.
ARTICLE 2 - Sont interdits la vente et le port sur la voie publique ou dans les établissements ouverts au public, des insignes aux couleurs nationales, quelle qu'en soit la forme, s'ils sont revêtus d'un emblème quelconque.
ARTICLE 3 - Les contraventions à la présente Ordonnance [au présent arrêté] seront poursuivies conformément aux lois en vigueur. »



Arrêté du Préfet de l'Aude
6 juillet 1915

(source)



Ordonnance du Préfet de Paris
10 juillet 1915

(source)



Arrêté du Préfet du Pas de Calais
10 juillet 1915

(source)


Le 28 juillet, le Pape Benoît XV exhorte les peuples belligérants à la paix.

« Au nom du Dieu très saint, au nom de notre Père céleste et Seigneur, par le Sang précieux de Jésus, qui a racheté l’humanité, Nous vous conjurons, ô Vous que la divine Providence a préposés au gouvernement des nations belligérantes, de mettre finalement un terme à cette horrible boucherie qui, depuis une année, déshonore l’Europe. »
Texte intégral de l'Exhortation Apostolique du Pape Benoît XV.




1917

Le 26 mars, les drapeaux alliés (France, Angleterre, Belgique, Italie, Russie, Serbie, Roumanie, Pologne, Japon), écussonnés du Sacré-Cœur, sont bénis solennellement à Paray-le-Monial : voir la page des pèlerinages à Paray.

L'offensive du Chemin des Dames est lancée le 16 avril. Dans les semaines qui suivent, des refus collectifs d'obéissance ont lieu dans l'armée française, et ces mutineries connaissent un pic d'intensité entre le 20 mai et le 10 juin. Plusieurs dizaines de soldats sont fusillés pour l'exemple.

A partir du 1er juin, les préfets interdisent progressivement l'apposition de tout emblème sur le drapeau national, et menacent de poursuite les contrevenants (circulaire du ministre de l'Intérieur Malvy).

A Lyon la police saisit, à la librairie catholique de Mme Veuve Paquet, les insignes du Sacré-Coeur exposés dans le magasin avec défense d’en exposer d’autres en étalage.

Le 7 juin, le ministre de la Guerre, Paul Painlevé (1863-1933), interdit par circulaire la consécration des soldats au Sacré-Coeur. La plupart des soldats vont désormais porter leurs insignes du Sacré-Cœur cachés dans leurs vêtements. Ceux qui refusent d'obtempérer sont mis aux arrêts.
Un aumônier militaire, l'Abbé Fontaine, brancardier au 97e RI s’interroge : « Figurez-vous qu’une décision vient de nous interdire le port de la cocarde du Sacré-Cœur… Oh ! Ce n’est pas ce qui amoindrira la foi profonde et le dévouement de nos soldats. Mais c’est tout de même curieux qu’en pleine guerre on vienne ainsi taquiner ceux qui ont donné à la France et au monde le spectacle le plus grandiose par leur abnégation et leur bravoure… » (Source)

Par décisions ministérielles en date des 18 et 21 juillet, au nom de la liberté de conscience et de la neutralité religieuse de l'Etat français, le gouvernement interdit la consécration des soldats au Sacré-Cœur et le port, aux armées, de fanions et étendards du Sacré-Cœur.


Voir également la page Prières et consécrations


Le 1er août, Benoît XV lance aux nations en guerre un nouvel appel à la paix et propose sa médiation. Les alliés la considère trop favorable à l'Allemagne, et seuls Washington et Berlin y répondront positivement.

« Dans une situation si angoissante, en présence d'une menace aussi grave, Nous qui n'avons aucune visée politique particulière, qui n'écoutons les suggestions ou les intérêts d'aucune des parties belligérantes, mais uniquement poussé par le sentiment de Notre devoir suprême de Père commun des fidèles, par les sollicitations de Nos enfants qui implorent Notre intervention et Notre parole pacificatrice, par la voix même de l'humilité et de la raison, Nous jetons de nouveau un cri de paix et Nous renouvelons un pressant appel à ceux qui tiennent entre leurs mains les destinées des nations. »
Texte intégral de la Lettre du Pape Benoît XV.

L’Episcopat français prescrit aux fidèles une prière, à réciter devant le Saint Sacrement, pour un retour à la paix.

Ô Jésus, présent dans cette sainte Hostie, nous voici prosternés à vos pieds, pour implorer la miséricorde de votre Sacré Cœur en faveur de la France notre patrie.
Elle passe par une dure et longue épreuve, elle est à une heure d’une exceptionnelle gravité.
Ô Christ, ami des Francs, daignez agréer les sanglants holocaustes de tant de généreuses victimes ; soyez touché des souffrances de nos blessés, des fatigues de nos soldats. Ayez pitié de l’angoisse des mères, des larmes des veuves et des orphelins. Bénissez les efforts de ceux qui luttent si courageusement, et accordez-nous le bienfait d’une paix juste et durable.
Nous avons péché : nous le reconnaissons humblement ; nous vous faisons amende honorable pour toutes les fautes privées et publiques par lesquelles nous avons offensé votre souveraineté et votre amour.
Nous vous promettons pour l’avenir d’accomplir tous vos commandements, et ceux de votre Eglise, de sanctifier le dimanche par l’assistance au Saint Sacrifice de la Messe, d’être fidèles à la Communion pascale, d’observer les saintes lois du mariage, de donner à nos enfants une éducation chrétienne. Nous travaillerons par tous les moyens en notre pouvoir à la restauration de votre règne dans notre chère patrie.
Cœur Sacré de Jésus, ayez pitié de nous.
Cœur Immaculé de Marie, priez pour nous.
Saint Michel, priez pour nous.
Bienheureuse Jeanne d’Arc, priez pour nous.
Saints et Saintes de France, Priez pour nous.



verso


En cette année 1917, d'autres prières sont ordonnées dans quelques diocèses particuliers, comme à Paris, Autun et Bordeaux (voir ci-dessous).



Autun, mars 1917
pages intérieures : 1 - 2 - 3 - verso



Bordeaux, 1917
pages intérieures - verso


Voir également la page Prières et consécrations


Le 6 août, une Note aux Armées signée du ministre de la guerre montre l'ampleur des emblèmes religieux au front :

« Grand Quartier Général des Armées du Nord et du Nord-Est, Etat Major 1er Bureau N° 5796 (Confidentiel).
Le 6 août l917. Note pour les Armées.
A la date du 29 juillet sous le N° 8748 D, le ministre écrit ce qui suit : "A la date du 21 juillet 1917, comme suite à ma lettre N° 7296 D du 18, vous avez prescrit aux armées d'observer une stricte neutralité religieuse et d'interdire en particulier les emblèmes apparents portés sur l'uniforme et les fanions ou bannières arborant des images religieuses".
M. le ministre de l'Intérieur [Malvy], me signale qu'une propagande cléricale active est exercée actuellement sous diverses formes auprès des soldats du front.
Certaines ligues font confectionner par centaines de mille des fanions et des étendards du Sacré-Cœur, destinés aux troupes, que l'"Œuvre de l'Insigne du Sacré-Cœur" expédie gratuitement par colis postaux, portant cette mention "linge" ou "conserves", aux aumôniers militaires, aux prêtres mobilisés, et à certains officiers.
D'autre part, plusieurs officiers, sur la recommandation d'autorités religieuses, s'efforceraient de consacrer leur unité au Sacré-Cœur, par un acte qui constitue une violation flagrante de la liberté de conscience de leurs hommes et de la neutralité religieuse de l’Etat français. Il me sera rendu compte de toutes les indications qui seraient relevées à ce sujet.
Paul Painlevé (Ministre de la guerre)
En conséquence :
1) Les militaires (officiers et hommes de troupes) qui recevront d'oeuvres quelconques des fanions ou étendards revêtus d'emblèmes religieux les remettront immédiatement à leur chef de corps qui en assurera la réexpédition à l'Œuvre expéditrice.
2) Les généraux commandant les armées rappelleront aux officiers sous leurs ordres qu'ils doivent dans le service s'abstenir de tout acte à caractère confessionnel constituant une violation flagrante de la liberté de cnscience de leurs hommes et la neutralité de l'Etat Français. »
Pétain (Général en chef des armées)
Note aux Armées du 6 août 1917, in Alain Denizot, Le Sacré-Cœur et la Grande Guerre, Paris, N.E.L., 1994.
Eclaboussé par le scandale du "Bonnet Rouge" journal vendu à l’Allemagne, Malvy démissionne le 31 août.

Le 10 août, le Conseil d'Etat adoucit l'arrêté ministériel du 1er juin, annulant l'interdiction de l'adjonction d'un emblème sur le drapeau tricolore dans les édifices et emplacements ouverts au public.
Texte intégral de l'arrêt Baldy.



1918

Le 8 juillet, l'Abbé Paul Noyer, curé de Bombon (village de Seine-et-Marne, à l'est de Melun), écrit une lettre au général Foch, qui lui est remise le jour même.

« Mon Généralissime, avant de quitter bientôt peut-être ma paroisse, veuillez, je vous prie, agenouillé devant une statue du Sacré-Cœur de Jésus, Roi de France, lui consacrer toutes vos armées françaises. Demandez-lui avec supplication une prochaine et décisive victoire et que la France reste triomphante tant et surtout par ses Traités que par ses glorieux succès. Veuillez agréer, mon Généralissime, les très humbles sentiments de votre serviteur entièrement dévoué, Paul Noyer, Curé de Bombon. »
In Alain Denizot, Le Sacré-Cœur et la Grande Guerre, Paris, N.E.L., 1994.
Le 9 juillet, le général Foch consacre les armées alliées au Sacré-Cœur dans l'église de ce petit village de Bombon, et commence lui-même une neuvaine au Sacré-Cœur. Le 16 juillet, il rendra visite à l'Abbé Noyer : « Monsieur le Curé, je viens vous remercier, j'ai fait tout ce que vous m'avez demandé et même plus. » L'offensive allemande déclenchée le 15 juillet en vue de prendre Paris échoue, et le succès de la contre-offensive du 18 juillet, avec les chars du général Mangin lancés à l'attaque dans la forêt de Villers-Cotterêts, marque la deuxième victoire de la Marne.

« Hommage de reconnaissance au célèbre Maréchal Foch qui, pendant les cinq mois et demi qu'il est resté à Bombon, a fortement édifié les habitants de cette paroisse, autant par la vivacité de sa foi que par la simplicité de sa piété.
Aussi, le Dieu des Armées a-t-Il récompensé miraculeusement le génie de l'illustre généralissime.
Sans doute, nul n'oubliera la science, la valeur et la bravoure de ses officiers ni l'héroïsme de ses soldats.
Jamais non plus on n'oubliera qu'il a consacré le 9 juillet 1918 au Sacré-Cœur les armées françaises et alliées et qu'aussitôt sa neuvaine finie, le Ciel lui répondit le 18 juillet 1918 en lui accordant cette merveilleuse victoire qui fera pour toujours l'admiration des peuples et des plus grands capitaines.
»
Plaque commémorative de l'église de Bombon.



Château de Bombon
Résidence du général Foch en 1918



Eglise de Bombon



Eglise de Bombon


Le 11 novembre 1918, signature de l’armistice.



Général Mangin (1866-1925)
verso



11 novembre 1918



Maréchal Foch (1851-1929)
verso



Le 17 novembre suivant, du haut de la chaire de la cathédrale de Saint-Vincent de Chalon, le Père Perroy, Jésuite de l'Œuvre de l'Insigne du Sacré-Cœur, révélera : « A genoux devant le Sacré-Cœur, le général Foch a demandé au Sacré-Cœur, en lui consacrant les armées dont il avait la charge : premièrement une victoire prompte et définitive, deuxièmement une paix glorieuse pour la France. »

« Si je devais faire l'historique de ce qu'ils furent, ces soldats, ce sont des pages d'épopée que vous entendriez. Ils ont dépassé toutes les limites de l'endurance, de la valeur, de la bonne volonté, Dieu sait en quelles épreuves terribles, par la durée et la violence. Les actes accomplis par les évêques, les fidèles et l'armée, pour réaliser le Message du Sacré-Cœur, en particulier le déploiement fréquent du drapeau du Sacré-Cœur sur le champ de bataille, joints aux prières, aux sacrifices et aux réparations de toute la France, lui ont attiré la protection du Christ. Ne nous lassons pas de l'en remercier. »
Maréchal Foch, séance d'ouverture du Conseil général de Tarbes, octobre 1919, in Ch. Marcault, Réalisons le Message du Sacré-Cœur.





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Le Sacré-Coeur de Jésus - Deux mille ans de Miséricorde
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« Les personnes qui propageront cette dévotion, auront leur nom inscrit dans mon Cœur, et il ne sera jamais effacé. »
(11ème promesse du Sacré-Coeur à sainte Marguerite-Marie)


  Notre dossier complet sur la dévotion au Sacré-Coeur de Jésus