Exposition
sur l'histoire et l'actualité de
la dévotion au Sacré-Coeur de Jésus



Panorama des thèmes présentés dans cette exposition

Jusqu’au XVIIe siècle - XVIIe siècle - XVIIIe siècle - XIXe siècle - XXe siècle - Thèmes généraux


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Du XIVe au XVIIe siècle :
de Ste Catherine de Sienne à Bossuet

Sainte Catherine de Sienne (1347-1380)



Th. Rubierre scudit
H. Bonmy Editeur, Poitiers


Sainte Catherine de Sienne (Catherine Benincasa, canonisée en 1461, et reconnue Docteur de l'Eglise en 1970), est une grande mystique italienne du Tiers Ordre des Mantellates de Saint Dominique, favorisée d'extases et de visions. Elle vit l'échange des cœurs au cours de l'été 1370 :

« Ma très douce fille, de même que l'autre jour je t'ai enlevé ton cœur, de même à cet instant je te livre le mien, qui te fera vivre toujours. »
Au cours de l'une des révélations dont elle fut gratifiée, elle demanda au Christ de lui expliquer cette blessure du Cœur :

« Doux Agneau sans tache, vous étiez mort quand votre côté fut ouvert, pourquoi donc avez-vous voulu que votre Cœur fût ainsi blessé et entrouvert ? Alors Jésus lui répondit : - J'avais plusieurs raisons, mais je vais te dire la principale. C'est que mon désir du genre humain était infini, alors que les tourments et les souffrances que j'endurais étaient finis. Je voulus donc, en vous montrant mon côté ouvert, que vous voyiez le secret de mon Cœur, que je vous aimais beaucoup plus que je ne pouvais vous le montrer avec ma souffrance finie. »
« Les pécheurs qui, pour l'énormité de leurs crimes, désespèrent de ma miséricorde, croyant que je n'ai pas assez de bonté pour leur pardonner, m'offensent plus grièvement par ce seul péché que par tous les autres qu'ils peuvent avoir commis, car ils méprisent ma miséricorde et ma bonté… Si, au contraire, ils avaient recours à mon divin Cœur, ils en ressentiraient aussitôt les effets admirables et se verraient délivrés de leurs maux, parce que la miséricorde de mon Cœur est plus grande que tous les péchés qui ont jamais été commis et qui peuvent l'être par toutes les créatures imaginables. »
Le Christ à Catherine de Sienne, in Abbé Levesque, L'Origine du Culte du Sacré-Cœur de Jésus, Avignon, Maison Aubanel Père, 1930.




Sainte Thérèse d'Avila (1525-1582)



Edition N.-D. d'Aiguebelle



"Portrait authentique de Ste Thérèse de Jésus"
Auteur anonyme, XVIe siècle



Boumard et Fils Editeurs, Paris


Sainte Thérèse d'Avila (canonisée en 1622), est la réformatrice du Carmel aux côtés de saint Jean de la Croix (1542-1591). Elle est l'auteur d'une Vie, du Chemin de la perfection, et du Château intérieur, tous publiés de façon posthume. Elle écrit dans une Lettre à Velazquez, évêque d'Osma, en 1581 :

« Vous mettrez devant vos yeux, ceux du corps et de l'âme, l'image de Jésus crucifié. […] La plaie de son côté, par laquelle il nous laisse voir son Cœur à découvert, vous révélera l'indicible tendresse d'amour qu'il nous a marquée, lorsqu'il a voulu que cette plaie sacrée fût notre nid et notre asile, et qu'elle nous servît de porte pour entrer dans l'arche au temps des tentations et des tribulations. Vous le supplierez, que, comme il a voulu que son côté fût ouvert pour preuve de l'amour qu'il nous portait, il fasse par sa bonté que le nôtre s'ouvre à son tour, que nous lui découvrions nos misères et que nous lui en demandions avec succès le remède. »




Saint Pierre Canisius (1521-1597)



Gravure sur bois XVIIIe



B. Kühlen, Typ. Ap. - M. Gladbach



Wilhelm Immenkamp (1870-1931)
L'Ecole de S. Pierre Canisius


Le 4 septembre 1548, Pierre Canisius prononce ses vœux solennels à Rome en présence d'Ignace de Loyola. Alors qu'il est venu se recueillir devant le Saint-Sacrement à la Basilique Vaticane, le Seigneur lui apparaît et lui ouvre son Cœur :

« J'étais à genoux… quand, par un nouveau bienfait, vous m'avez envoyé (mon Dieu !) un ange pour m'instruire et m'aider dans la vie plus parfaite du religieux profès. Accompagné de cet esprit bienheureux, je m'avançais vers l'autel, je tombais à genoux et je connus quelle était la mission de cet autre ange gardien. Mon âme difforme, impure et faible, souillée par le vice et les passions, était gisante à terre. L'ange, tourné vers le trône de la divine Majesté, dévoilait l'étendue de mes misères et la multitude de mes fautes, pour me faire comprendre toute mon indignité ; il semblait dire : Voyez comme il sera difficile de le conduire dans une voie si haute !
Mais alors, ô mon divin Rédempteur ! vous m'avez entr'ouvert votre Cœur adorable et vous m'avez permis d'y plonger mon regard ; vous m'avez invité à puiser en vous les eaux du salut, ordonné de boire à vos fontaines sacrées. Comme je désirais avec ardeur être inondé des flots d'amour, d'espérance et de foi que j'en voyais jaillir ! Quelle soif de pauvreté, de chasteté, d'obéissance ! Je vous suppliais de me purifier, de me revêtir d'innocence comme au baptême. Enfin, approchant mes lèvres brûlantes de votre Cœur très doux, j'osai me désaltérer à cette source divine ; et vous me promettiez, Seigneur, pour couvrir la nudité de mon âme, un vêtement céleste, composé de trois étoffes les mieux adaptées à la profession : la paix, la charité, la constance. Orné de ce vêtement de salut, j'avais pleine confiance que rien ne me manquerait plus, et que tout me réussirait pour votre gloire.
La messe des vœux fut célébrée, en présence de tous nos frères, par le premier général de notre Compagnie, votre fidèle serviteur Ignace.
»
Pierre Canisius, Mémorial (in Le Bienheureux Canisius, ou l'apôtre de l'Allemagne au seizième siècle, Paris, Douniol, 1865).
Initié à la dévotion au Cœur du Christ par son maître Nicolas Van Esch (1507-1578), ami de Lansperge, il n'aura de cesse à son tour d'exhorter ses confrères à unir leur volonté au divin Cœur :

« Le Cœur de Jésus brûle pour nous d'un tel amour, que ce Fils de Dieu et de la Vierge est prêt à souffrir pour toi seul toutes les amertumes intérieures et extérieures qu'Il a souffertes pour le monde entier, plutôt que de permettre ta perte ou la ruine d'une seule âme. »
Pierre Canisius, in Abbé Levesque, L'Origine du Culte du Sacré-Cœur de Jésus, Avignon, Maison Aubanel, 1930.




Saint Louis de Gonzague (1568-1591)



A. Schleich scudit
Benziger & C°, Einsiedeln



R. Pannier Editeur, Paris


Saint Louis de Gonzague (canonisé en 1726), rejoignit le noviciat des Jésuites à Rome en 1585, prononça ses vœux deux ans plus tard, et mourut à 23 ans, reconnu par tous comme un modèle de vertu. Trois ans après sa canonisation, Benoît XIII le nomma « protecteur spécial de la jeunesse ».
Sainte Madeleine de Pazzi (1566-1607), qui le découvrit au cours d'une vision le 4 avril 1601, écrivit :

« Je voudrais pouvoir parcourir tout l'univers, et dire que Louis, fils d'Ignace, est un grand Saint, et je voudrais faire connaître sa gloire à tout le monde, afin que Dieu en fut glorifié… […] Lorsqu'il était encore mortel, il lançait des flèches contre le Cœur du Verbe incarné, et maintenant dans le ciel, ces flèches reviennent se fixer dans son cœur, parce qu'il le possède maintenant, et qu'il jouit dans le ciel de cette union avec Dieu qu'il méritait ici-bas par les actes de sa charité. »
De très nombreux miracles lui sont attribués, notamment celui concernant Nicolas Célestini, novice de la Compagnie de Jésus à Rome, qui est guéri miraculeusement le 9 février 1765 à la suite d'une apparition de Louis :

« Notre-Seigneur, lui dit le saint, t'accorde à ma prière, la santé, pour travailler encore à ta perfection et propager de toutes tes forces la dévotion à son Sacré-Cœur, dévotion très chère à tous les habitants du paradis. »
Le nom de Saint Louis de Gonzague sera intimement lié au mouvement de Paray-le-Monial.




Sainte Marie-Madeleine de Pazzi (1566-1607)



Gravure XIXe



Theodor Boeyermans (1620-1678)
Vision de Sainte Marie-Madeleine de Pazzi
Musée de Gand



Silvio Zannelli, S. Maria Maddalena de' Pazzi
25 mai 2007, IVe centenaire de sa mort


Sainte Marie-Madeleine de Pazzi (Catherine de Geri de Pazzi, canonisée en 1669), est l'une des plus grandes mystiques italiennes, favorisée d'extases exceptionnelles, stigmatisée en 1584 (les marques restant invisibles), dont la Vita écrite par Vincenzo Puccini fut publiée à Venise en 1675, et une Vita ed estasi en 3 volumes en 1893. Elle vécut l'échange de son cœur avec le Cœur de Jésus le 10 juin 1584. Dans une lettre adressée à Sainte Catherine Ricci, elle écrit que les souffrances et les prières « seront autant de flèches qui blesseront le Cœur de notre Epoux et le provoqueront à lancer tant d'autres flèches de son amour aux âmes consacrées à Lui et si désunies…. »

On trouve dans la IIIe partie de ses Œuvres de belles lignes sur le Cœur du Sauveur (ch. XXII) :

« Quel est le nom du vase qui contient cette douce liqueur [de l'amour] ? Ce vase s'appelle le Cœur du Verbe. Tout petit qu'il est, il la contient cependant malgré son abondance, et il aspire à la répandre dans un vase plus petit encore, qui est le cœur de la créature… Oh ! que c'est bien à juste titre que le Cœur du Verbe incarné fut choisi pour être la source de cette précieuse liqueur ! De quelle montagne vit-on jamais sortir une source si abondante ?… Quelle fontaine possède des eaux plus limpides que cet amour très pur ? Ces eaux sont si abondantes qu'elles arrosent le ciel et la terre. »




Bienheureuse Marie de l'Incarnation (1599-1672)


En 1631, Marie Martin entre chez les Ursulines, et y prend le nom de Marie de l'Incarnation. Huit années plus tard, elle implantera cet Ordre au Canada. C'est dans ces années trente que Dieu lui inspire une pratique de dévotion au Sacré-Cœur (Exercice du Cœur sacré de Jésus), qu'elle décrira beaucoup plus tard dans un courrier adressé à son fils, devenu Bénédictin de la Congrégation de Saint-Maur :

« J'ai coutume de parler ainsi à Dieu le Père, par le Cœur de mon Jésus, ma voie, ma vérité et ma vie : Je viens à vous, ô Père éternel ! par ce divin Cœur ; je vous invoque pour tous ceux qui ne vous adorent pas, et je vous aime pour tous ceux qui ne vous aiment pas ; je vous reconnais et vous confesse au nom de tous les aveugles volontaires qui vous méprisent et ne veulent pas apprendre à vous connaître ; je voudrais, par ce divin Cœur, satisfaire à tous les devoirs que les hommes ont à remplir envers vous. Je parcours en pensée l'univers tout entier, et je cherche toutes les âmes rachetées par le précieux sang de mon divin Epoux. Je les embrasse et les réunis toutes pour vous les offrir par lui, je vous demande la grâce de leur conversion. O Père saint, éternel, souffrirez-vous donc qu'elles ne connaissent pas mon Jésus et qu'elles ne vivent pas pour celui qui est mort pour elles ?
O Père céleste, vous voyez qu'elles n'ont pas encore la vie : ah ! faites par ce divin Cœur qu'elles vivent…
Dans ce divin Cœur, je vous offre N* N*, au nom de mon époux ; je vous en supplie, remplissez-les de votre esprit ; faites qu'avec l'aide et la bénédiction de ce divin et très saint Cœur, ils méritent de vivre avec vous éternellement.
Puis je m'adresse au Verbe divin fait homme pour nous, et je lui dis : Vous savez, ô mon bien-aimé, tout ce que je veux demander à votre Père par votre divin Cœur et votre sainte âme ; je vous le dis en même temps que je le lui demande, parce que vous êtes dans votre Père et votre Père est en vous. Opérez donc tout ce bien avec lui. Je vous offre ces âmes, faites qu'elles soient une avec vous. Telle est ma pratique de dévotion envers le divin Cœur de Jésus.
»
Marie de l'Incarnation, Ecrits, in R.P. Schmude, La Dévotion au Sacré Cœur de Jésus, Paris, Desclée, De Brouwer, 1899.




Jacques-Bénigne Bossuet (1627-1704)



Tableau de Hyacinthe Rigaud 1659-1743)
Musée du Louvre, Paris



Tableau de Hyacinthe Rigaud 1659-1743)
Musée Bossuet, Meaux



Neurdein Edition
Début XXe


Le 27 décembre 1658, Bossuet prononce à Metz le Panégyrique de l'Apôtre saint Jean :

« En ce Cœur est l'abrégé de toutes les merveilles du christianisme. Mystères de charité dont l'origine est au Cœur ; un Cœur, s'il se peut dire, tout pétri d'amour : toutes les palpitations, tous les battements de ce Cœur, c'est la charité qui les produit. Voulez-vous voir saint Jean vous montrer tous les secrets de ce Cœur ? Il remonte jusqu'au principe, in Principio. C'est pour venir à ce terme : et habitavit, il a habité parmi nous (Jean 1,14). Qui l'a fait habiter avec nous ? L'amour. C'est ainsi que Dieu a aimé le monde, sic Deus dilexit mundum. C'est donc l'amour qui l'a fait descendre pour se revêtir de la nature humaine. Mais quel Cœur aura-t-il donné à cette nature humaine, sinon un Cœur tout pétri d'amour ?
C'est Dieu qui fait tous les cœurs, ainsi qu'il lui plaît. Le Cœur du Roi est dans sa main, comme celui de tous les autres, Cor regis in manu Dei est (Prov. 21,1) ; regis, du Roi Sauveur. Quel autre cœur a été plus dans la main de Dieu ? C'était le Cœur d'un Dieu, qu'il réglait de près, dont il conduisait tous les mouvements ; Qu'aura donc fait le Verbe divin, en se faisant homme, sinon de se former un Cœur sur lequel il imprimât cette charité infinie qui l'obligeait à venir au monde ? Donnez-moi tout ce qu'il y a de tendre, tout ce qu'il y a de doux et d'humain ; il faut faire un Sauveur qui ne puisse souffrir les misères sans être saisi de douleurs, qui, voyant les brebis perdues, ne puisse supporter leur égarement. Il lui faut un amour qui le fasse courir au péril de sa vie, qui lui fasse baisser les épaules pour charger dessus sa brebis perdue, qui lui fasse crier : Si quelqu'un a soif, qu'il vienne à moi, si quis sitit, veniat ad me (Jean 7,37) ; venez à moi, vous tous qui êtes fatigués, venite ad me omnes qui laboratis (Mat. 11,28) ; venez pécheurs, c'est vous que je cherche. Enfin il lui faut un Cœur qui lui fasse dire : je donne ma vie, parce que je le veux, ego pono eam a meipso (Jean 10,17). C'est moi qui ai un Cœur amoureux, qui dévoue mon corps et mon âme à toutes sortes de tourments.
Voilà, mes frères, quel est le Cœur de Jésus, voilà quel est le mystère du christianisme. C'est pourquoi l'abrégé de la foi est renfermé dans ces paroles : Nous avons cru à l'amour que Dieu a pour nous, nos credidimus caritati quam habet Deus in nobis… mais si nous y croyons, il faut l'imiter. Ce Cœur de Jésus embrasse tous les fidèles ; c'est là où nous sommes tous réunis "pour être consommés dans l'unité" (Jean 17,23). C'est le Cœur qui parlait, lorsqu'il disait : "Père, je veux que là où je suis, mes disciples soient aussi avec moi" (17,24). Il ne distrait personne, il appelle tous ses enfants, et nous devons nous aimer "dans les entrailles de la charité de ce divin Sauveur, in visceribus Jesu Christi" (Philip. 1,8).
Ayons donc un cœur de Jésus-Christ, un cœur étendu, qui n'exclue personne de son amour. C'est de cet amour réciproque qu'il se formera une chaîne de charité qui s'étendra du Cœur de Jésus dans tous les autres, pour les lier et les unir inviolablement ; ne la rompons pas ; ne refusons à aucun de nos frères d'entrer dans cette sainte union de la charité en Jésus-Christ. Il y a place pour tout le monde. Usons sans crainte des biens qu'elle nous procure, nous ne les perdrons pas en les communiquant aux autres, mais nous les possédons d'autant plus sûrement ; ils se multiplient pour nous avec d'autant plus d'abondance que nous désirons plus généreusement les partager avec nos frères… Aimons donc dans le Cœur de Jésus. "Dieu est charité, et qui persévère dans la charité demeure en Dieu et Dieu en lui" (1 Jean 4,16). »
J.-B. Bossuet, Extraits du Panégyrique de l'Apôtre saint Jean.


Suite : le XVIIe siècle - L'Ordre de la Visitation : St François de Sales, Ste Jeanne de Chantal




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« Les personnes qui propageront cette dévotion, auront leur nom inscrit dans mon Cœur, et il ne sera jamais effacé. »
(11ème promesse du Sacré-Coeur à sainte Marguerite-Marie)


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