Livres anciens - Beaux textes




Robert de Langeac (Abbé Augustin Delage, 1877-1947) :
Contemplation et action - Ames d'apôtres...


Contemplation et Action
Conseils apostoliques
Ames d'apôtres
Sans Moi, rien


Contemplation et Action.

Appréciez la vraie vie active à sa valeur. Quand une âme aime le Bon Dieu, l'action pour Dieu la rapproche de Lui bien qu'il lui semble souvent le contraire. Dilige et quod vis fac...

Aimer Dieu, Le faire aimer, se faire oublier le plus possible - bonne tactique.

Le jour où vous aurez la paix intérieure vous ferez du bien presque sans vous en apercevoir.

Avec le temps et la grâce, l'action arrive à être pénétrée de vie intérieure. Il y a comme dédoublement, car les facultés intérieures sont occupées à une chose donnée tandis que l'on reste recueilli avec Lui par les facultés supérieures - et unification - car les facultés supérieures gardent toujours le contrôle.

La vie mixte est la plus parfaite quand elle est la vraie vie mixte et donne de plenitudine contemplationis. C'est, je crois, parce que cette condition, ou mieux cette cause n'est pas posée que certaines âmes qui la mènent n'avancent guère vers les hauteurs et ne font qu'un bien diminué. Mais ne jugez pas. Le problème a d'autres données. Il est très complexe. Il y aura toujours malheureusement très peu d'âmes tendant vraiment à la perfection. Il en coûte tant de se travailler à fond et de se laisser travailler de même par le Bon Dieu.

Travaillez toujours à creuser votre âme pour en faire une âme de vie intérieure profonde et simple tout ensemble. C'est votre grand moyen d'évangélisation. Plus il y aura d'âmes vraiment intérieures à J, plus le pays tout entier sera soulevé par la grâce vers le Bon Dieu. C'est le vrai ferment.

Sans doute la culture aide à faire du bien. Mais l'essentiel c'est la grâce. Dieu la donne à qui la lui demande dès qu'il s'agit de sa gloire.

Tenez-vous uni par la charité à la Très Sainte Trinité quand vous parlez aux âmes. Le bien se fera. Insistez sur la dévotion à Marie, notre Mère.

Faire de petites haltes spirituelles. Vous arriverez au recueillement de volonté par les oraisons jaculatoires et en vous efforçant de renouveler votre offrande plus souvent le long de la journée. C'est important pour vous dans vos nouvelles fonctions.

Etre soucieux de sa perfection avant de se dépenser pour aider ses frères à conquérir la leur. Ce n'est pas égoïsme étroit, c'est dans l'ordre.

Croire de plus en plus au besoin d'union à Dieu pour faire le bien. Notre Seigneur n'agit par une âme que lorsqu'Il a agi dans cette âme. Lui laisser le temps et le moyen de le faire. Plus on est près de Dieu, plus on voit clair.

Aimer les âmes c'est leur vouloir du bien à elles. Or, il n'y a qu'un bien, c'est Dieu. Vous le donnerez sans avoir à vous en préoccuper par cela seul que vous Le posséderez. Visez donc à l'union chaque jour plus intime et plus profonde. Tout est là pour vous.

Remerciez pour tout ce qu'Il a fait et veut faire encore en vous et par vous.

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Conseils apostoliques.

Aux timorés. - Tenez grand compte des conditions posées pour votre apostolat (action extérieure réglée et plus en profondeur qu'en surface) ; mais ceci fait, repoussez toute crainte de perdre la vie intérieure. Jésus sait récompenser « un verre d'eau froide », a fortiori ... Agir en s'effaçant.

Vue large et juste pour supprimer un exercice de piété personnel - quand le Saint-Esprit le demande. S'excuser auprès de Notre-Seigneur quand les autres sont en jeu. Reprendre le règlement où l'on en est pour éviter la surcharge.

II faut faire les œuvres que le Bon Dieu vous confie avec intérêt, mais sans attache. Il fait comprendre la différence et met dans le juste milieu.

Faites vos œuvres uniquement pour plaire à Jésus. Quand vous reviendrez, le Bon Maître tiendra Lui-même la porte ouverte et Il vous recevra avec une bonté qui vous confondra. S'Il vous fait attendre, humiliez-vous ; voyez en quoi peut-être vous vous êtes recherché, priez et frappez discrètement. Mais restez là.

Aux surmenés. - Quand les occupations apostoliques ne laissent guère de temps à l'esprit, il faut offrir cette peine au Bon Dieu et aimer cette volonté divine. Revenir à Lui, puis reprendre son travail en mettant ainsi un frein à son activité.

Ne faites rien par entraînement, avec précipitation. C'est un véritable obstacle à la vie intérieure. Avant l'action demandez la grâce de vous posséder, pendant l'action, servez-vous des oraisons jaculatoires, après l'action examinez la manière dont vous avez utilisé votre activité.

Agissez posément, vous agirez mieux, vous gagnerez du temps et vous garderez la paix de Jésus au fond du cœur.

Aux impatients. - Le bien a toujours été difficile à faire. Il l'est plus encore. à notre époque et dans nos milieux, mais c'est là et malgré ces difficultés, que le Bon Dieu nous demande de travailler. Essayons donc de semer la Vérité de notre mieux. A son heure, la récolte mûrira.
En tout cas, il nous reste toujours le Bon Dieu à aimer et à servir pour Lui-même. Faisons-le de notre mieux.

Jeter des idées, les semer afin qu'elles aient le temps de germer. Puis attendre. Le résultat viendra, mais il faut du temps.

Zèle prudent, discret, mais réel. Agir sur une élite.

II faut faire de bon cœur le sacrifice de ne pas savoir si l'on fait du bien. Se priver de cette joie pour ne rien accorder à la sensibilité.

Aux égoïstes. - Vous arrivez dans une œuvre le cœur ouvert. Mais ce n'est pas la charité cela. Vous espérez retour, réciprocité. Demander l'amour surnaturel du prochain, cet amour intelligent, vraiment désintéressé. Vouloir le vrai bien surnaturel. Chercher à faire plaisir sans s'arrêter à la joie personnelle de faire plaisir.

Ce qui fait écran entre le Bon Dieu et vous, ce ne sont pas les œuvres que vous faites, mais la manière dont vous les faites.

Pour être efficace, mon apostolat doit être désintéressé et comme impersonnel. Jésus le veut ainsi. A Lui de choisir ses épouses et de les doter. A moi de prier pour qu'Il soit vraiment aimé par elles sans que j'en sache rien si c'est mieux pour sa gloire, bien que ce soit une consolation pour moi de le constater.

C'est parce que vous agissez humainement que vous êtes déçu quand vous ne recueillez pas le fruit de votre dévouement.

Si Jésus veut se servir de moi comme d'un instrument caché pour faire du bien aux âmes, je suis content. On n'a pas la satisfaction que l'on aurait à prêcher, à parler aux âmes, à voir le bien qui se fait, mais pourvu que le bien se fasse !

Il est heureux que vous n'ayez pas d'attrait naturel pour le milieu dans lequel vous devez vivre. Il faudrait s'en défier et le combattre. Votre âme est libre ainsi dans sa montée vers le Bon Dieu. Mais souvenez-vous sans cesse que la charité fraternelle est la meilleure condition et le fruit très doux de l'union à Dieu.

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Ames d'apôtres.

La première vertu de l'apôtre, c'est la foi.

Qu'en vous approchant, on devine le Bon Dieu sans que rien paraisse. Quand on vous demande quelque chose, répondez toujours aimablement afin qu'on ne craigne pas de venir à vous. Il y a une chose qu'on ne vous demandera pas, c'est le Bon Dieu. Alors dites au fond de votre cœur : « Vous ne me Le demandez pas... mais je vous Le donne. » Oui, c'est Vous-même, ô mon Dieu, que je veux donner.

Sans doute pour réaliser vos plans éternels, ô mon Dieu, Vous n'avez besoin de personne et les ouvriers les plus laborieux seront toujours en un sens et quoiqu'ils fassent des ouvriers inutiles.
Mais pourtant Vous agissez comme si les créatures étaient pour Vous des instruments nécessaires. Tout se passe comme s'il Vous fallait des points d'appui dans le monde.
Or ceux que Vous choisissez pour être les récepteurs des énergies surnaturelles à diffuser sont précisément ceux que Vous avez rendus fermes en les rétablissant ou presque dans l'ordre primitif en ce qui regarde la soumission parfaite des facultés inférieures aux facultés supérieures.

Pour un pécheur à convertir, il faut surtout demander des grâces intérieures.

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Sans Moi, rien.

« De même que le rameau ne peut porter de fruit par lui-même s'il ne demeure sur la vigne, ainsi vous non plus, si vous ne demeurez en moi. » (1)

Merci, ô Jésus, de nous avoir rappelé si clairement notre impuissance radicale pour le bien surnaturel. Porter du fruit bon pour l'éternité est tout à fait au-dessus de nos forces naturelles. Au vrai, de nous-mêmes, si nous ne voulons pas compter sur Vous, que sommes-nous, sinon mensonge et péché au regard de notre fin véritable et unique ? Ce qui est vrai pour nous personnellement, l'est plus encore quand il s'agit du bien à faire aux autres. Quelle n'est pas notre impuissance naturelle ? Seuls, nous ne savons comment nous y prendre pour éclairer nos frères du dehors et pour les soutenir dans le chemin. Quant à pénétrer sans Vous dans les volontés pour les retourner ou simplement les mouvoir vers Vous, il ne faut pas y songer.

C'est donc pour nous une nécessité absolue, une question de vie ou de mort que de nous tenir étroitement unis à Vous par la foi et l'amour. Heureuse nécessité que chaque instant de réflexion nous rappelle ! Quoi de meilleur pour nous et de plus doux que votre intimité ? N'êtes-Vous pas tout pour nous ? Qu'y a-t-il dans le monde pour nous en dehors de Vous sinon les ténèbres et la mort ? Puis, c'est par Vous seul qu'on va au Père nemo venit ad Patrem nisi per me (2). C'est Vous seul qui nous apprenez à Le connaître, à L'adorer et à L'aimer. Seul, Vous pouvez faire de nous ce pour quoi nous sommes au monde « des adorateurs du Père en esprit et en vérité, ceux que le Père désire et cherche » et que Vous êtes venu comme Lui recruter et Lui former en leur infusant votre esprit de religion, Vous que l'on a pu appeler si justement « le vrai et parfait religieux de Dieu ».

(1) Joan XV, 4.
(2) Joan XIV, 7.

Robert de Langeac, extrait de "Vous... mes amis", 2° partie, chapitre IV, Paris, P. Lethielleux, 1952.


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