Vingt-troisième Jour La médaille du maréchal Bugeaud C’est en 1841 que Bugeaud vint prendre, avec le gouvernement de l’Algérie, la direction de la guerre d’Afrique. Les temps étaient rudes alors. De toutes parts, les Arabes avaient organisé la résistance, grâce à nos hésitations de plus de dix années. Nos officiers, nos généraux succombaient en grand nombre sous les armes de l’ennemi, ou sous les coups non moins redoutables de la maladie. Quelques mois auparavant, le général en chef lui-même, Damrémont, avait été frappé mortellement sous les murs de Constantine. La famille du maréchal voyant son chef se préparer à partir, était donc, on le comprend, dans de vives angoisses, d’autant plus légitimes que Bugeaud ne s’épargnait pas et qu’on le savait toujours le premier au feu. L’une de ses pieuses filles lui demanda, la veille de son départ, d’accepter de sa main une médaille de la sainte Vierge et de lui permettre de la passer à son cou, comme une sauvegarde contre tant de périls. Le général, ému de cette marque de confiance et de tendresse, accéda aussitôt à ce désir. Il lui laissa placer sur sa poitrine, attachée à un simple cordon, une petite médaille en argent. Le jour même, le général dînait, à Périgueux, dans une société nombreuse. L’évêque du diocèse s’y trouvait, et comme il exprimait au général son espoir que Dieu protégerait ses armes : « Ah ! Monseigneur, répondit Bugeaud, je ne suis pas un incrédule ; moi aussi j’ai confiance en Dieu, et pour vous en donner la preuve, voici des armes que j’emporte avec moi ! » Et en disant ces mots, Bugeaud tira de sa poitrine la petite médaille d’argent suspendue à son cou : « C’est une médaille de la sainte Vierge, dont j’ai promis à ma fille de ne plus me séparer. » Le vieux maréchal a tenu parole. Dans toutes ses guerres d’Afrique, la petite médaille de la sainte Vierge est restée sur son cœur, et Marie s’est plu à récompenser la confiance pieuse de l’enfant et l’acte de foi du vieux maréchal. Il sortit sain et sauf de tous les périls de ses dix-huit campagnes, où tant de braves succombèrent à ses côtés. Aussi, quand il partit d’Alger, voulut-il garder sa médaille en témoignage de reconnaissance. Elle était encore suspendue à son cou lorsqu’il mourut, quelques années après, dans les sentiments les plus admirables, et c’est seulement après sa mort que les mains de sa fille ont repris, avec un pieux respect, l’image de Marie sur la poitrine du vieux soldat. (Connu). Résolution. – Penser souvent au ciel et le désirer. Pratique du jour « L’on n’a pas Jésus pour rien : il faut prendre part à ses croix. » (1) Belle parole que nous devrions tous graver dans nos mémoires, ou mieux encore buriner en caractères indélébiles au fond de nos cœurs. « L’on n’a pas Jésus pour rien ». Et comment en serait-il autrement ? Tout ne coûte-t-il pas dans ce monde ? Arrive-t-on sans peine à la gloire, ou seulement à la notoriété, à l’estime publique ? S’élève-t-on sans travail jusqu’aux honneurs ? Le plaisir lui-même ne se paye-t-il pas souvent par l’effort ? Pourquoi donc Jésus seul ne nous coûterait-il rien sur la terre ? Serait-il donc un bien inférieur à ces biens que d’une main brutale la mort nous enlèvera demain ? Bossuet a raison par conséquent : « L’on n’a pas Jésus pour rien ». Puisque nous voulons l’avoir, prenons donc part à ses croix. Sous quelques formes et à quelque moment qu’elles nous viennent, sourions-leur sans faiblesse et ayons confiance. Car celui de qui viennent toutes les croix et toutes les gloires ne nous les enlèvera pas seules. Divin Crucifié, il nous viendra sûrement avec elles pour nous aider à les porter. (1) : Elévations, XIXe sem., IIIe élévat. Prière Votre foi, Vierge sainte, fut plus grande ici-bas que la foi réunie des patriarches et des prophètes, des apôtres et de tous les saints. La nôtre, au contraire, n’est que trop souvent faible, intermittente, pleine de lâcheté et de paresse. Remédiez à toutes ces faiblesses, ô Mère aimable, et donnez-moi la foi vraie qui fait les élus : une foi vive, qui en tout et partout voie Dieu préparant mon salut et ma gloire future ; une foi inébranlable comme le granit, qui me maintienne ferme au milieu des épreuves de cette vie et de ses multiples orages ; une foi agissante qui ait horreur de l’indolence ; une foi pleine de vaillance qui me fasse entreprendre pour Jésus-Christ tous les travaux qu’il lui plaira de m’imposer ; une foi constante, qui jusqu’au bout m’y fasse persévérer sans faiblesse ; une foi enfin grâce à laquelle, m’oubliant toujours moi-même, je ne songe qu’au Maître dont je suis le serviteur inutile, et je n’agisse que par son amour ! Obtenez-moi cette foi, ô ma Mère, et je marcherai sans crainte dans ce monde ; car, à la lueur de ce flambeau divin, je sens et je sais que je ne pourrai ni m’égarer ni me perdre. Amen. |