Mois de Marie

d'après Bossuet



Septième Jour

L’angélique Eugène

Un jeune séminariste, du nom d'Eugène, se faisait remarquer par sa piété, à tel point que le supérieur du séminaire, en parlant de lui, l'appelait : l'angélique Eugène. Rien qu'à le voir, on sentait en lui une âme pure, ses camarades l'aimaient tous, il avait dans la maison la plus heureuse influence. L'aliment de sa piété était sa dévotion envers la Très Sainte Vierge. Chaque jour, on le voyait longtemps agenouillé dans sa chapelle, abîmé en une fervente prière. A dix-huit ans, ce bon enfant était frappé d'un mal qui ne pardonne pas ; c'était pendant les vacances et, comme il était pauvre, on dut le porter à l'hôpital.
La mort venait. Elle fut précédée d'une agonie affreuse. On sentait Satan acharné contre une âme qui lui avait fait du mal et qu'il rageait de voir lui échapper. On calme le malade par l'invocation du nom de Marie et il reposait enfin doucement, murmurant, avec peine, de pieuses aspirations qu'on lui suggérait ; quand, tout à coup, il se dresse sur son séant, regarde fixement devant lui comme en extase, puis s’adressant au prêtre qui l’assistait, il dit : « Oh ! ne voyez-vous pas, comme c’est beau… cette belle dame qui m’appelle… j’y vais ! » et il retombait mort entre les bras du prêtre.
Ce prêtre écrit ces lignes. Il a cru alors et croit toujours que la Sainte Vierge, pour récompenser l’amour extraordinaire qu’avait pour elle l’angélique Eugène, était venue cueillir sur la terre ce lys pur et beau, pour l’offrir elle-même à son divin Fils, l’ami des cœurs vierges.

Résolution. – Nous appliquer par amour de la Sainte Vierge à une humilité vraie et à une idéale pureté.


Pratique du jour

« C’est un Jésus-Christ que Marie nous donne (1), rendons-lui un Jésus-Christ en nous-mêmes ; et faisons revivre en nos âmes ce Fils qu’elle perd pour l’amour de nous. Je sais bien que Dieu le lui a rendu glorieux, ressuscité, immortel ; mais encore qu’elle le possède en sa gloire, elle ne laisse pas de le chercher encore dans tous les fidèles. Soyons donc chastes et pudiques, et Marie reconnaîtra Jésus-Christ en nous. Soyons humbles et obéissants, comme Jésus l’a été jusqu’à la mort ; ayons des cœurs tendres et les mains ouvertes pour les pauvres et les misérables ; oublions toutes les injures, comme Jésus les a oubliées, jusqu’à laver dans son propre sang même le crime de ses bourreaux. Quelle sera la joie de Marie, quand elle verra revivre Jésus-Christ en nous ; dans nos âmes par la charité, dans nos corps par la continence ; sur les yeux même et sur les visages, par la retenue, par la modestie et par la simplicité chrétienne ! C’est alors que reconnaissant en nous Jésus-Christ par la pratique exacte de son Evangile, ses entrailles seront émues de cette vive représentation de son bien-aimé ; et touchée jusque dans le cœur de cette sainte conformité, elle croira aimer Jésus-Christ en nous, et elle répandra sur nous toutes les douceurs de son affection maternelle. »

       (1) : Bossuet, Œuvres orat., t. II, p. 356.


Prière

Mère de Dieu, vous êtes aussi notre Mère, ô Vierge sainte. Vous nous avez enfantés au Calvaire auprès de la couche sanglante où mourut votre divin Fils. Nous sommes ainsi devenus doublement ses frères. Honneur inespéré pour nos âmes. Puissent-elles ne jamais l’oublier ! Puissent-elles en rester toujours dignes ! Défendez-les donc, ô Mère bénie, de tout ce qui serait de nature à les flétrir, en fixant la grâce en elles. Ecartez d’elles toutes les taches et toutes les souillures. Sauvegardez intacte en elles leur beauté sacrée, afin que le chaste regard de votre glorieux Fils puisse s’y arrêter et s’y complaire dans le temps et dans les siècles des siècles. Ainsi soit-il.


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