Sur la Nativité de Notre-Seigneur Pour le salut de l'univers Aujourd'hui les cieux sont ouverts, Et par une conduite immense La grâce descend dessus nous. Dieu change en pitié son courroux, Et sa justice en clémence. Le vray fils de Dieu tout-puissant Au fils de l'homme s'unissant En une charité profonde, Encor qu'il ne soit qu'un enfant, Victorieux et triomphant, De fers affranchit tout le monde. Dessous sa divine vertu Le péché languit abattu, Et de ses mains à vaincre expertes Etouffant le serpent trompeur, Il nous assure en notre peur Et nous donne gain de nos pertes. Les oracles sont accomplis, Et ce que par tant de replis D'âge promirent les prophètes Aujourd'hui se finit en lui, Qui vient consoler notre ennui En ses promesses si parfaites. Grand roi, qui daignas en naissant Sauver le monde périssant, Comme père, et non comme juge, De grâces comblant notre roi, Fais qu'il soit des méchants l'effroi, Et des bons l'assuré refuge. Qu'ainsi qu'en été le soleil, Il dissipe, aux rais de son œil, Toute vapeur et tout nuage ; Et qu'au feu de ses actions Se dissipant les factions, Il n'ait rien qui lui fasse ombrage. Mathurin Régnier (1573-1613) |