« Seigneur, ô que l'abondance est grande des douceurs que vous avez réservées pour ceux qui vous craignent ! (Ps 30, 20) Quand je rappelle en ma mémoire, ô mon Dieu ! avec quelle dévotion et quelle ardeur certaines personnes pieuses s'approchent de votre Sacrement, je me confonds souvent en moi-même, et je rougis de m'approcher de votre Autel et de votre sainte Table si froidement et avec tant de tiédeur. J'ai honte d'être si sec et sans aucune affection pour vous dans le coeur, de n'être pas tout enflammé devant vous, qui êtes mon Dieu, et de ne pas ressentir en moi ces attraits et ces mouvements affectueux qu'ont eus tant de personnes dévotes, qui pressées d'un désir extrême de la communion, et du sentiment d'un amour tendre, n'ont pu retenir leurs larmes ; mais qui vous ouvrant en même temps la bouche de leur coeur et de leur corps, comme à la source des eaux vivantes, aspiraient à vous de toutes leurs forces, ne pouvant autrement apaiser leur faim et se rassasier, que par la réception de votre corps qu'elles recevaient avec un transport de joie et avec une avidité spirituelle. Ô que leur foi était véritable et vive ! qu'elle prouve bien la vérité de votre sainte présence ! Car ces personnes reconnaissent véritablement leur Seigneur dans la fraction du pain (Lc 24, 35), lorsqu'elles ont le coeur si brûlant et si plein de Jésus qui marche avec elles. Je suis souvent bien éloigné d'une affection et d'une dévotion semblables, et d'une charité si ardente. Ô bon Jésus ! qui êtes la bonté et la douceur même, soyez-moi propice. Accordez à votre serviteur pauvre et mendiant, de ressentir au moins de temps en temps dans la sainte communion quelque étincelle de votre amour, afin que ma foi se fortifie de plus en plus, que mon espérance en votre bonté s'augmente, et que ma charité étant une fois bien allumée, et ayant goûté cette Manne céleste, ne s'éteigne jamais. » L'Imitation de Jésus-Christ, Livre IV ch. XIV, trad. R.P. de Gonnelieu, Paris, chez Le Fuel, s.d. |