« Qu'est-ce qui est plus beau que le génie ? C'est l'amour. Plus beau que l'esprit ? C'est le coeur. Si Dieu est beau quand il suspend les astres au firmament, il est plus beau quand, infiniment grand, il s'incline vers l'infiniment petit que nous sommes ; quand, après avoir, des profondeurs de l'éternité, mesuré sans limites la distance qui sépare Dieu de l'homme et semble se dresser contre tous ses projets d'amour, et, après l'avoir cependant franchie, il vient parmi nous se pencher sur toute faiblesse pour la protéger, sur toute misère pour la soulager, sur toute infirmité pour la guérir, sur toute déchéance pour la relever ; il est plus beau quand, tandis que jusqu'alors le fait dominant toute la société antique avait été l'écrasement du faible par le fort : l'écrasement du citoyen par l'Etat, l'écrasement du pauvre par le riche, l'écrasement de l'enfant et de la femme par l'homme, l'écrasement de l'esclave par le maître, Lui prend en pitié l'esclave dont il brise les chaînes, le pauvre qu'il divinise, l'enfant qu'il serre sur son coeur, le blessé du chemin qu'il relève dans ses bras, la veuve en pleurs à qui il rend son fils, Marthe qu'il console, Marie-Madeleine à qui il permet de baiser ses pieds, la femme adultère qu'il arrache à la mort, et le larron expirant à qui il ouvre le ciel. Sur toute cette foule immense qu'est l'humanité lasse, sans pain, il jette le mot de son infinie compassion : Misereor super turbam ; et, quelles que doivent être les ingratitudes ou les haines de cette foule ignorante et trompée, pour elle il répandra son sang jusqu'à la dernière goutte, à elle il réserve sa chair pour la nourrir jusqu'à la fin du monde. Au spectacle de tant d'amour, de ses divines pitiés et de ses inlassables tendresses, dites-moi pourquoi nos yeux se mouillent plus vite, pourquoi un frisson plus intime nous gagne ?... Le coeur est le sommet de l'homme, et, si j'ose dire, le sommet de Dieu ; et de toutes les beautés du Christ Jésus, celle qui nous apparaît d'une essence plus divine, c'est l'Amour ! Voilà pourquoi saint Jean, qui avait pénétré plus avant dans la divinité, quand il a voulu définir Dieu, n'a pas dit : Il est la Puissance ou le Sagesse ou l'Intelligence ; mais : Il est l'Amour, Deus Caritas est ! Or, la dévotion au Sacré-Coeur c'est la dévotion à cet Amour. C'est dire sa sublimité. » P. Joseph Calot s.j., in "Le Messager du Coeur de Jésus", Juin 1914. Cité par l'Abbé R. Béringer in "Recueil documentaire - Le Sacré-Coeur", Belgique, Chez l'auteur, Deuxième édition, 1927. (p. 384) |