« "Notre Père qui êtes aux cieux". Ô mon Seigneur, comme il paraît bien que vous êtes le Père d'un tel Fils ! et comme votre Fils manifeste bien qu'il est le Fils d'un tel Père ! Soyez-en béni à jamais ! Ne suffirait-il pas, ô Seigneur, que nous eussions la faveur de faire cette prière à la fin de l'oraison ? Or, c'est dès le début que vous nous remplissez les mains et que vous nous accordez une telle faveur ! Notre entendement devrait en être tellement rempli et notre volonté tellement pénétrée, qu'il nous fût impossible de proférer une parole. Ô mes filles, que ce serait bien ici le lieu de traiter de la contemplation parfaite ! Oh ! comme il serait juste que l'âme rentrât au-dedans d'elle-même ! Elle pourrait mieux s'élever alors au-dessus d'elle-même et écouter ce que ce Fils béni lui apprendrait sur ce lieu où, comme il le déclare, se trouve son Père qui est dans les cieux ! Quittons la terre, mes filles ; il n'est pas juste qu'après avoir apprécié tout le prix d'une telle faveur, nous l'estimions si peu que nous restions encore sur la terre. » Sainte Thérèse de Jésus (1515-1582), Chemin de la perfection, ch. XXIX, in Œuvres, Seuil, 1948. |
« Il se peut que nous priions tout simplement le Notre Père et tout à coup nous vient à l'esprit que cette prière est la prière du Christ, qu'elle n'est pas uniquement la nôtre : le Christ prie le Père et l'Esprit pour nous, avec nous, la prière du Notre Père représente donc l'Eglise, tête et corps, le Seigneur avec la communauté à laquelle il a fait don de ses paroles.Lorsque nous prenons conscience de cela, nous comprenons que nous sommes dans une plénitude terrestre et céleste tout ensemble, qui se révèle au Père comme à nous-mêmes dans cette prière ; nous sommes soulevés au-dessus de notre sphère jusque dans le monde de Jésus-Christ, monde qui ne veut pourtant pas être séparé du nôtre : nous sommes les amis du Christ, nous avons part à sa parole, comme les invités à un festin. Cela confère à notre prière, au-delà de nous-mêmes, son unité. Nous prions dans sa réalité à lui, le Christ. Peu importe que nous priions rapidement tout le Notre Père ou que nous nous arrêtiions tout le temps que dure notre prière à une seule parole : l'unité est dans sa Parole, qu'il est lui-même finalement. Cette unité entre la Parole et le Corps du Christ, c'est la plénitude du Père, mais c'est aussi le mystère de l'Eucharistie. C'est pour cela qu'on prie le Notre Père avant la communion. Mais parce que l'Esprit du Fils est infini, une parole du Notre Père peut suffire, ou même la considération de ce que le Christ nous donne dans sa chair et son sang, ou encore simplement dans une seule parole adressée au Père dans laquelle il nous a tous fondamentalement admis. » Adrienne von Speyr (1902-1967), L'expérience de la prière, P. Lethielleux, Dessain et Tolra, 1978. |
Je vous propose aussi ce partage d'une analyse des deux versions évangéliques du "Notre Père" et de leurs différentes traductions, qui m'a semblé intéressante et fort bien documentée, ici. |
« Père, c'est à toi que je m'adresse, ce soir, avec une confiance tranquille et paisible. Ton Fils m'a appris que tu étais mon Père, qu'il ne fallait pas t'appeler d'un autre nom. Tu n'es que Père. Père, je viens simplement te dire que je suis ton enfant, et je te le dis sérieusement, et pourtant avec l'envie de rire et de chanter, tellement c'est beau d'être ton fils : mais c'est sérieux, car tu m'as tellement aimé, et moi, si peu, Père, fais de moi ce que tu veux ; me voici pour faire ta Volonté, ta Volonté, je le sais, elle est que je devienne semblable à ton Unique, le Frère Aîné qui m'a appris ton nom, que je marche sur le même chemin ; je sais cela, et avec quel amour je l'accepte ! O Père, je n'ai point de force, mais j'ai la tienne. Me voici : travaille en moi, taille et coupe, soulève-moi ou laisse-moi tout seul, je ne te ferai jamais l'injure d'avoir peur ou de croire que tu m'oublies, et si je trouve la croix très lourde, et que je n'y voie plus, je pourrai du moins te répéter inlassablement que je crois à ton amour et que j'accepte ta volonté. Mais je veux boire au même calice que ton Fils ; ô Père, ne me le refuse pas… Mais tu ne me le refuseras pas, puisque je sais que telle est ta Volonté. Père, me voilà ; je n'ai pas fini de te faire de la peine, mais tu ne finiras jamais de me pardonner. Quant à l'amour, je serai toujours battu… non, car tu me donneras le tien, tu me donneras ton Amour, ton Fils, en qui je pourrai tout. Seigneur Dieu, voici ma vie pour que tu en fasses ce que tu voudras, pour que tu en fasses la vie de Jésus-Christ. Mais tu ne pourras pas empêcher que partout où tu m'enverras, joyeux ou désolé, malade ou bien portant, comblé ou humilié, l'Esprit en moi clame vers toi, véhément, appelant ton Amour impérieusement pour mes frères les hommes qui ne savent pas que tu es Père. O Père, voici ma vie, mais donne-moi mes frères, que je te les rende. » Père Lyonnet (1906-1949), Ecrits spirituels, Epi, 1951. |
« Celui qui est en une fervente oraison ne sait s'il est en oraison ou non, car il ne pense pas à l'oraison qu'il fait, mais à Dieu à qui il la fait. » Saint François de Sales (1567-1622), Traité de l'amour de Dieu, Livre IX, ch. XI, "Oeuvres", nrf - Gallimard, 1969. |