« Si vous portez de bon coeur la Croix, elle-même vous portera et vous conduira au terme désiré, où vous cesserez de souffrir ; mais ce ne sera pas en ce monde. Si vous la portez à regret, vous en augmentez le poids, vous rendez votre fardeau plus dur, et cependant il vous faut la porter. Si vous rejetez une Croix, vous en trouverez certainement une autre, et peut-être plus pesante. Croyez-vous échapper à ce que nul homme n'a pu éviter ? Quel saint a été dans ce monde sans croix et sans tribulation ? Jésus-Christ lui-même, Notre-Seigneur, n'a pas été une seule heure dans toute sa vie sans éprouver quelque souffrance : Il fallait, dit-il, que le Christ souffrît, et qu'il ressuscitât d'entre les morts, et qu'il entrât ainsi dans sa gloire (Lc 24,46s). Comment donc cherchez-vous une autre voie que la voie royale de la sainte Croix ? [...] Cependant celui que Dieu éprouve par tant de peines n'est pas sans consolations qui les adoucissent, parce qu'il sent s'accroître les fruits de sa patience à porter sa Croix. Car, lorsqu'il s'incline volontairement sous elle, l'affliction qui l'accablait se change toute entière en une douce confiance qui le console. [...] Ce n'est point là la vertu de l'homme, mais la grâce de Jésus-Christ, qui opère puissamment dans une chair infirme, que tout ce qu'elle abhorre et fuit naturellement, elle l'embrasse et l'aime par la ferveur de l'esprit. Il n'est pas selon l'homme de porter la Croix, d'aimer la Croix [...] Si vous ne regardez que vous, vous ne pouvez rien de tout cela. Mais si vous vous confiez dans le Seigneur, la force vous sera donnée d'en haut et vous aurez pouvoir sur la chair et le monde. Vous ne craindrez pas même le démon, votre ennemi, si vous êtes armé de la foi et marqué de la Croix de Jésus-Christ. » L'Imitation de Jésus Christ, Livre II, ch. 12, 5-9, Trad. Abbé F. de Lamennais (Texte intégral) |