10h15 Place Saint-Pierre : Sainte Messe et canonisation des Bienheureux : - Vincenzo Grossi (1845-1917) - Maria dell’Immacolata Concezione (1926-1998) - Louis Martin (1823-1894) et Marie Zélie Guérin (1831-1877) |
Au début de la célébration célébrée place Saint-Pierre ce dimanche matin, devant près de 80.000 fidèles, quatre bienheureux ont été canonisés par le Saint-Père dont le premier couple de l’histoire de l’Église catholique à être canonisé, Louis et Zélie Martin, parents de sainte Thérèse de l’Enfant Jésus. La date de cette canonisation ce dimanche est symbolique, non seulement parce qu’elle intervient au cœur du Synode sur la Famille, mais aussi car ce 18 octobre l’Église fête la Journée missionnaire mondiale, placée sous le patronage de sainte Thérèse, elle-même canonisée il y a 90 ans, en 1925. Les époux Martin « ont honoré le mariage et la famille chrétienne » Lors du rite de canonisation au début de la messe, le Cardinal Angelo Amato, Préfet de la Congrégation pour les causes des saints, a évoqué la vie des quatre bienheureux, dont celle des époux Martin : « Le Bienheureux Louis Martin et la Bienheureuse Marie Zélie Guérin, avec leur vie, ont honoré le mariage et la famille chrétienne, comme époux et parents exemplaires. Louis est né à Bordeaux en 1823 et s’est dédié au commerce, comme propriétaire d’un négoce de bijouterie et d’horlogerie. En 1858, il a épousé Marie Zélie Guérin, née à Alençon en 1831, où elle dirigeait une petite usine de dentelles. » Le Cardinal Angelo Amato poursuit : « Leur famille fut vraiment une petite Église dans laquelle régnait une foi joyeuse et profonde, et une charité délicate et attentionnée. Ensemble, les deux bienheureux ont parcouru les voies de la sainteté conjugale. De leur union sont nés neuf enfants, mais seules cinq filles ont survécu : quatre, parmi lesquelles Sainte Thérèse de l’Enfant-Jésus, sont entrées au Carmel de Lisieux, et la cinquième est devenue sœur visitandine à Caen. L’exemple quotidien des parents fut décisif dans leur vocation religieuse. Marie Zélie, malade du cancer, est décédée en 1877 à l’âge de 45 ans. Son mari a traversé l’ultime période de sa vie dans la prière et entre de nombreuses infirmités. Il s’est endormi dans le Seigneur en 1894, à l’âge de 71 ans. Louis et Marie Zélie furent béatifiés ensemble le 19 octobre 2008. » Les nouveaux saints, un témoignage du service joyeux pour les autres Évoquant à son tour les bienheureux canonisés ce dimanche, le Saint-Père est revenu lors de son homélie sur leur humilité et leur charité, « ils ont constamment servi leurs frères avec une humilité et une charité extraordinaires ». Le Pape a ensuite dit un mot de chacun de ceux qui ont été faits saints : « Saint Vincent Grossi a été un curé plein de zèle, toujours attentif aux besoins de ses gens, spécialement aux fragilités des jeunes. Pour tous, il rompait avec ardeur le pain de la Parole et il est devenu un bon samaritain pour les plus nécessiteux. » Parlant de Sainte Marie de l’Immaculée Conception, le Pape François a rappelé qu’ « elle a vécu elle-même dans une grande humilité le service des derniers, avec une attention particulière aux enfants des pauvres et aux malades. » Quant aux saints époux Louis Martin et Marie Zélie Guérin, « ils ont vécu le service chrétien dans la famille, construisant jour après jour une atmosphère pleine de foi et d’amour ; et dans ce climat ont germé les vocations de leurs filles, parmi lesquelles sainte Thérèse de l’Enfant-Jésus. » Ces nouveaux Saints sont un « témoignage lumineux qui nous pousse à persévérer sur la route du service joyeux des frères. » a-t-il insisté. Le récit de saint Marc de ce dimanche revient sur le sens du service. Le texte raconte les désirs de Jacques et Jean, qui veulent à tout prix être assis à la droite et à la gauche de Jésus, « revendiquant des places d’honneur ». Première secousse de Jésus aux convictions de ses disciples explique le Pape citant les textes : « La coupe que je vais boire, vous la boirez… Quant à siéger à ma droite et à ma gauche, ce n’est pas à moi de l’accorder ; il y a ceux pour qui cela a été préparé » Pour le Saint-Père, cette réponse est une invitation à suivre le Christ « sur le chemin de l’amour et du service, repoussant la tentation mondaine de vouloir exceller et commander aux autres. » Changer de mentalité, passer de la convoitise du pouvoir à la joie de servir Le Pape a ensuite insisté sur le thème du service. Comme Jésus appelle ses disciples à être serviteur plutôt qu’à chercher le pouvoir et le succès, le Souverain Pontife nous appelle à changer de mentalité. « Vous le savez : ceux que l’on regarde comme chefs des nations les commandent en maître ; les grands leur font sentir leur pouvoir. Parmi vous, il ne doit pas en être ainsi. Celui qui veut devenir grand parmi vous sera votre serviteur » rappelle-t-il en citant l'Evangile. « Avec ces paroles, il indique le service comme style de l’autorité dans la communauté chrétienne ». « Celui qui sert les autres et est réellement sans prestige exerce la véritable autorité dans l’Église. » Nous sommes invités à « changer de mentalité et à passer de la convoitise du pouvoir à la joie de disparaître et de servir » ajoute le Pape, « à extirper l’instinct de domination sur les autres et à exercer la vertu de l’humilité. » insiste-t-il. Dans la tradition biblique, le Fils de l’homme est celui qui reçoit de Dieu « domination, gloire et royauté » Le Christ donne un nouveau sens à cette image précise le Saint-Père : « Jésus a le pouvoir en tant que serviteur, la gloire en tant que capable d’abaissement, l’autorité royale en tant que disponibilité au don total de sa vie. C’est en effet, par sa passion et sa mort qu’il conquiert la dernière place, atteint le maximum de grandeur dans le service, et en fait don à son Église. » C’est une question d’incompatibilité précise le Pape. « Incompatibilité entre une manière de concevoir le pouvoir selon des critères mondains et l’humble service qui devrait caractériser l’autorité selon l’enseignement et l’exemple de Jésus. Incompatibilité entre ambitions, arrivismes et suite du Christ ; incompatibilité entre honneurs, succès, réputation, triomphes terrestres et la logique du Christ crucifié. Il y a au contraire compatibilité entre Jésus “expert en souffrance” et notre souffrance. » Source : Radio Vatican. Texte intégral traduit en français sur le site internet du Vatican. Texte intégral original en italien sur le site internet du Vatican. |
Octobre 1876 : Zélie Martin vient d'apprendre le diagnostic tranchant du médecin, son cancer du sein, inopérable. Elle sait gré au praticien de sa franchise. « Il m'a rendu service une fois, écrira-t-elle, c'est le jour où il m'a dit toute la vérité, cette consultation-là est sans prix pour moi. » Elle écrira deux mois plus tard une lettre à sa belle soeur, toute de confiance et d'abandon en la volonté divine. « Je n'ai pu m'empêcher de dire tout chez nous. Je m'en repens à présent, car c'était une scène de désolation... tous pleuraient ; cette pauvre Léonie sanglotait. Mais je leur ai cité tant de personnes qui avaient été dix et quinze ans comme cela, et je paraissais si peu inquiète, faisant mon affaire aussi gaiement que d'habitude - peut-être davantage - que j'ai un peu calmé mon monde. Je suis cependant loin de m'illusionner, et j'ai peine à m'endormir le soir, quand je pense à l'avenir. Toutefois, je me résigne le mieux possible, mais j'étais loin de m'attendre à une pareille épreuve... Mon mari ne peut se consoler ; il a laissé le plaisir de la pêche, monté ses lignes dans le grenier, ne veut plus aller au Cercle Vital, il est comme anéanti... Je voudrais bien que cela ne vous tourmente pas trop et que vous vous résigniez à la volonté de Dieu ; s'il me trouvait bien utile sur la terre, certainement il ne permettrait pas que j'aie cette maladie, car je l'ai tant prié de ne pas m'enlever de ce monde, tant que je serais nécessaire à mes enfants. Maintenant, Marie est grande, elle a un caractère très sérieux et n'a aucune des illusions de la jeunesse. Je suis sûre que lorsque je ne serai plus là, elle fera une bonne maîtresse de maison et tout son possible pour bien élever ses petites soeurs et leur donner le bon exemple. Pauline aussi est charmante, mais Marie a plus d'expérience ; elle a d'ailleurs beaucoup d'ascendant sur ses petites soeurs. Céline montre les meilleures dispositions, ce sera une enfant très pieuse, il est bien rare de montrer à son âge de telles inclinations à la piété. Thérèse est un vrai petit ange. Quant à Léonie, le bon Dieu seul peut la changer, et j'ai la conviction qu'il le fera... Elles seront bien heureuses de vous avoir quand je ne serai plus là ; vous les aiderez par vos bons conseils, et, si elles avaient le malheur de perdre leur père, vous les prendriez chez vous, n'est-ce pas ? Cela me console beaucoup de penser que j'ai de bons parents, qui nous remplaceront avantageusement, en cas de malheur. Il y a de pauvres mères bien plus malheureuses que moi, qui ne savent pas ce que vont devenir leurs enfants, qui les laissent dans le besoin, sans secours aucun ; moi, je n'ai rien à redouter de ce côté. Enfin, je ne vois pas les affaires en noir, c'est une grande grâce que le bon Dieu me fait... » Ste Zélie Guérin (1831-1877), Lettre du 17 décembre 1876 à sa belle-soeur, in P. Stéphane-Joseph Piat "Histoire d'une famille", Carmel de Lisieux, Paris, 1945. Réédité cet automne par Téqui, sous le titre "L'histoire extraordinaire de la famille Martin", avec une Préface du P. Pierre Descouvemont. |