« Le livre à choisir pour la lecture méditée n'est pas le livre seulement instructif ou pieux, pas même le livre intéressant qui captive, mais le livre suggestif qui provoque la réflexion, stimule les sentiments, ou mieux encore le livre qui réveille et tient l'âme en présence de Dieu. Une simple lecture ne serait pas une lecture méditée. La lecture méditée doit être interrompue pour réfléchir devant Dieu, pour lui exprimer des sentiments, pour s'entretenir avec lui. Elle sera courte ou prolongée selon les besoins, et ne sera reprise que lorsque l'âme défaille dans son impuissance. Si la lecture enfin, par les flots de pensées et de sentiments qu'elle suggère, faisait oublier Dieu, elle manquerait son but. La lecture n'est ici qu'un moyen destiné à faciliter l'oraison. Son rôle exclusif est de fournir un sujet d'entretien avec Dieu, d'assurer un soutien pour s'unir à lui ; elle est au service de ce commerce d'amitié avec Dieu qui est l'acte essentiel de l'oraison ; elle ne doit jamais s'en laisser distraire et c'est vers ce but que l'âme doit la ramener sans cesse. La lecture méditée sera normalement l'oraison du novice dans les voies spirituelles. Le contemplatif lui-même y reviendra aux heures de fatigue physique ou morale pour soutenir ou reposer ses facultés, ou encore pour les arracher aux préoccupations trop vives ou obsédantes qui empêchent le recueillement. Ecoutons les expériences douloureuses et concluantes de sainte Thérèse sur ce point : "Pour moi, je suis restée, dit-elle, plus de quatorze ans sans pouvoir méditer, sinon à l'aide d'un livre." (Le Chemin de la perfection, ch.XIX) » Vénérable Marie-Eugène de l'Enfant-Jésus (1894-1967), Je veux voir Dieu, Editions du Carmel, 1949. |