« Quand je vois sous mes yeux tant d'amours qui s'égarent dans l'erreur, qui se précipitent dans la chair ou qui se perdent dans le vide ; et quand je vois tant d'autres qui ne savent où ils vont, je me dis, dans un élan d'amour fraternel et d'ambition apostolique : Oh ! si tous ces amours venaient au foyer de tout amour ! Si ces coeurs qui fuient, s'égarent et se corrompent, venaient tous se reposer au Coeur de Jésus-Christ ! Si ces vents qui remuent la terre conspiraient tous ensemble pour ramener de nouveau tous ces coeurs à leur centre, c'est-à-dire au Coeur de Jésus-Christ ; grand Dieu ! quel changement dans les hommes, et quelle restauration dans les choses ! quelle ascension dans les âmes, quelle harmonie dans les coeurs, quelle force dans la société, quel progrès dans l'humanité ! Je me dis, en regardant le Coeur ouvert de Jésus-Christ, habitacle vivant de l'amour : Si tous nos coeurs étaient là, autour du Sacré-Coeur, centre de la vie du Christ, et du progrès chrétien ! s'ils étaient là prêts à suivre le mouvement qui l'emporte lui-même !... quel avenir, grand Dieu !... Ah ! c'est un rêve peut-être ; mais ce rêve vous me le pardonnez ; je rêve votre grandeur, je rêve votre progrès, je rêve votre bonheur ; je rêve dans le Coeur de celui que j'aime votre ciel sur la terre. Pardonnez-le, c'est un rêve d'ami, c'est un rêve de frère ; c'est un rêve d'apôtre aussi ; et mon Dieu qui me l'envoie me dit au coeur que ce rêve peut devenir et bientôt deviendra, sinon pour tous du moins pour un grand nombre, la réalité que j'appelle. Ô Dieu, vous voulez que nous emportions les coeurs par la puissance de votre Coeur ; et vous avez dit comme autrefois : Qui enverrai-je ? Quem mittam ? mon coeur vous a répondu : Me voici ! ô Maître, envoyez-moi : Ecce ego, mitte me (1) ! Je crois à la puissance de votre amour pour triompher du coeur des hommes ; mettez son feu dans mon coeur, sa flamme dans ma parole, et envoyez-moi : Ecce ego, mitte me. Si je n'emporte le tout, j'emporterai une partie, la partie généreuse, capable de donner l'impulsion à l'autre ; et puisse cette minorité montrer, par le miracle de son amour et le prodige de son agrandissement moral, que le progrès par le christianisme est ce que nous l'avons nommé : l'amour de Jésus-Christ régnant dans les chrétiens. » 1. : Isaïe VI, 8. R.P. C.J. Félix s.j. (1810-1891), Le Progrès par le christianisme - Conférences de Notre-Dame de Paris, Année 1858 (Sixième conférence : le progrès moral par l'amour de Jésus-Christ), 4e édition, Paris, Librairie d'Adrien Le Clere et Cie, s.d. |