« L'âme, n'est-il pas vrai, s'identifie avec son amour, et elle cherche aussi à ne faire qu'un avec tous les objets que cet amour embrasse, car l'amour tend essentiellement à l'union. S. Paul ne disait-il pas : Qui adhaeret Domino unus spiritus est ("Celui qui s'attache au Seigneur ne forme plus avec Lui qu'un même esprit" ICo VI,17) ? L'âme qui s'attache aux créatures et en abuse selon ses caprices, s'éparpille et se dissipe, perdant ainsi cette simplicité première en laquelle elle a été créée, et à laquelle elle doit revenir pour s'unir à son divin Auteur. - Que notre grande application soit donc de nous affranchir de toutes les concupiscences, de tous les attraits humains, pour vivre en ressuscités !... Détachement des biens extérieurs et des biens intérieurs qui ne sont pas selon Dieu ; détachement de nos affections déréglées pour les personnes et pour les choses, selon la parole de S. Grégoire : Ametur quilibet in hoc mundo adversarius ; sed in via Dei contrarius non ametur etiam propinquus ("Aimons tous nos ennemis en ce monde ; mais n'aimons pas même nos proches, s'ils nous détournent de la voie de Dieu") - Détachons-nous surtout de notre propre corps, qui est le grand obstacle de notre sanctification : Corpus quod corrumpitur aggravat animam ("Le corps qui se corrompt appesantit l'âme" Sg IX,15). Cette sorte de détachement va loin, et les Saints l'ont pratiqué héroïquement, en arrivant peu à peu, avec la grâce de Dieu, à dominer en eux cette gêne naturelle que la chair apporte aux opérations de l'esprit. Ce dernier dégagement est la grâce propre de la résurrection. O Vierge Sainte, dont le court sommeil n'entravait pas la prière, aidez-nous à devenir vraiment maîtres de notre corps de péché ! » Méditations Cartusiennes pour tous les jours de l'année (Mercredi après l'Octave de Pâques), par un Chartreux, T.II, Imprimerie de Parkminster, Partridge Green, Sussex, 1921. |